À son Service [pv Kailey]

Quoi qu’il en soit, nous en serions restés là, chacun campant sur son mensonge, si Arthur n’était pas intervenu.
Je m’en serais réjouie d’ordinaire mais les oreilles potentiellement indiscrètes de Luca m’avaient nettement refroidie.
Il n’était pas question de le laisser entendre nos projets !
Je n’étais pas stupide à ce point là non plus !
Je l’avais donc enjoins avec une certaine virulence à se taire et à remettre à demain cette conversation.
Je ne savais pas de quoi il en retournait mais ce qui était certain c’est que ça avait un rapport avec les vampires.

J’avais finalement réussis à éviter le pire et l’ami de mon frère avait accepté, perplexe mais docile, de ne rien me dire.
Je comprenais son incrédulité pour tout vous dire.
J’étais plutôt du genre curieuse et impatiente.
Je voulais tout savoir en temps et en heure, être la première informée surtout sur ce sujet précis mais là j’avais volontairement fais l’inverse de ce à quoi il s’attendait.
Pas surprenant donc qu’il ne comprenne pas…
Mais en même temps je me voyais mal lui expliquer que j’avais envoyé un vampire se cacher dans le coin…

Bref, l’important était qu’ils se soient enfin éclipsés sans jouer les inquisiteurs comme Matt adorait le faire.
Et là… bah je m’étais sentis toute bête…
Je supposais que j’allais devoir poursuivre la conversation entamée avec le « jeune » homme, peut-être même lui donner des explications sur ce qui venait de se passer et… je n’avais aucune idée de ce que j’aurais bien pu dire s’il m’interroger sur Gunner et son acolyte.
C’était assez embarrassant, je ne vous le cache pas !

Du coup, je l’avais appelé.
Je pouvais toujours tenter de m’enfuir mais soyons lucide, s’il était dans le coin il n’allait pas me laisser faire.
Vu les « efforts » qu’il avait fais pour que je l’accompagne, je doutais qu’il renonce aussi facilement à… faire ou dire ce qu’il avait en tête.

Et je ne tenais pas à me donner trop l’air d’une proie non plus.
Oui parce que s’enfuir dans un vampire, c’était comme de… je ne sais pas moi… se mettre à courir devant un jaguar ou quelques prédateurs du genre.
Ça leur donnait plus envie de vous attaquer qu’autre chose, en somme.
Donc j’étais suffisamment vulnérable comme ça pas la peine d’en rajouter.
Et ça n’avait rien à voir avec une quelconque envie de le revoir ou de poursuivre notre discussion, croyez-moi !

Sauf que là… rien.
Pas de réponse…
Je m’en serais presque inquiétée si je n’avais pas éprouvé une telle rancune pour lui… et plus simplement s’il avait été humain.
Là, la pire chose qui pouvait lui arriver c’était d’avoir changé d’avis et d’être rentré chez lui alors bon…
Une pire chose plutôt appréciable dans ma position mais passons.

Tout ça pour dire qu’il n’y avait rien à craindre à son sujet.
Il était immortel, je vous le rappelle !
Contrairement à moi, par exemple…
Donc s’il ne réapparaissait pas je n’allais pas non plus me faire un ulcère quoi…
Ce ne serait pas dramatique, loin de là !

Toutefois, j’étais… étonnée… étonnée qu’il ne soit pas déjà là en train de me dire encore je ne sais quoi pour me faire sortir de mes gonds.
C’est qu’il se faisait désirer maintenant !
… Et bien non, c’est bien tenté mais même comme ça, je n’aspirais pas à sa compagnie…
…

Bref, malgré tout, ce silence ne me réjouissait pas.
Je ne savais pas dire ce qui était le plus gênant entre l’idée qu’il soit parti ou l’idée qu’il l’ait fait sans rien me dire.
C’était ridicule !
J’en avais bien conscience…
Une part de moi était même sincèrement soulagée mais la seconde… beaucoup moins.
Rah !
Ciel, comme je détestais cette dualité permanente en moi !

J’avais donc décidé de retenter ma chance, histoire d’être convaincue à cent pour cent qu’il était parti.
Et j’avais employé son prénom.
S’il était dans le coin et qu’il m’entendait, je pensais que ça suffirait à le faire venir.
Et je n’avais pas tort.
Mon effort démesuré fut payant !
Et heureusement… sinon je nous aurais maudis tous les deux.

D’une manière toujours aussi abrupte et surprenante qu’à l’accoutumée, il apparut devant moi.
Je tentais de rester impassible, refusant de sursauter chaque fois qu’il utilisait sa super vitesse.
Et pourtant ça me faisait toujours le même effet… le genre de truc qui fait toujours un peu peur.
Une seconde avant je parlais dans le vide et à présent il se dressait fièrement devant moi !

Non mais attendez…
Fièrement ?
…
Pas tellement pour le coup…
Enfin si, malgré tout, son allure restait assez noble mais… laissais-moi vous expliquer.

Je m’apprêtais à… râler, pour changer, un peu froissée à l’idée qu’il avait fais semblant de ne pas m’entendre la première fois, songeant qu’il l’avait fais exprès pour m’embêter.
Si c’était un stratagème pour me forcer à l’appeler par son prénom, ça avait fonctionné, félicitation !
Donc, je comptais afficher une fois de plus toute la colère qu’il m’inspirait quand brutalement… et d’une manière tout à fait inattendu, celle-ci se volatilisa complètement, plus rapidement encore que n’avait disparu le vampire un peu plus tôt.

Il était là, visiblement essoufflé par sa course… course destinée à le ramener vers moi, rappelons-le… le truc à vous faire presque culpabiliser quoi.
Je me sentis même vaguement honteuse d’avoir faillis lui reprocher de m’avoir fait « attendre »…
Néanmoins, sur le coup, je ne compris pas ce qu’il lui arrivait, trop occupée à le dévisager, trouvant ses traits anormalement tirés.
Sa respiration semblait légèrement saccadée et son regard me parut même imperceptiblement voilé…

Mes sourcils se froncèrent légèrement tandis que j’entrouvrais les lèvres, prête à lui demander ce qui n’allait pas… puisqu’il y avait de toute évidence quelque chose qui n’allait pas…
Toutefois, je n’eu pas à le faire car mes prunelles glissant sur lui pour tenter de percer ce nouveau mystère rencontrèrent quelque chose qui n’aurait pas du y être.
Et pour cause… dans son ventre était fiché un… un pieu en bois ?!
Oh mon Dieu !

L’espace d’une seconde mon cœur bondit dans ma poitrine tandis que je retenais une exclamation mi stupéfaite mi-horrifiée.
Et c’est là que la pensée qu’il ne pouvait pas mourir me frappa de plein fouet.
S’il avait été pour mourir, il aurait déjà été en poussière et je ne l’aurais même jamais su…
Les vampires étaient immortels alors… il n’y avait rien à craindre pour lui.

De plus, quand bien même il aurait été blessé mortellement, ça… ça n’aurait rien du me faire.
Il n’était pas humain, après tout…
Pas… humain…
Je ne devais pas l’oublier ! Surtout pas !
Qu’est-ce que le sort de ce suceur de sang pouvait bien me faire en plus ?
Ça n’aurait pas été le premier de sa race que je voyais mourir, j’avais même contribué plusieurs fois à leur mort !
Mais là c’était… différent.

Je ne pouvais m’empêcher de m’angoisser quelque peu.
Oh ça ne m’enchantait pas mais je… je ne pouvais pas faire autrement.
Il avait l’air d’avoir vraiment mal et je… je n’étais pas insensible non plus !
Je n’étais pas partisante de la souffrance, pour ne rien vous cacher…
Quand je m’en prenais à un vampire par exemple, je tentais toujours de faire en sorte que ce soit le plus rapide possible…
Contrairement à Matt qui lui voulait toujours faire traîner les choses…


« - … et me voilà mon ange… » Commença-t-il apparemment mal en point.


…
… …
… … …

J’en aurais presque eu mal au cœur !
C’était atroce !
Je faillis d’ailleurs lui dire de ne pas parler…
Mais c’était absurde, un vampire n’avait sans doute pas besoin d’économiser ses forces.
Il se rétablirait de lui-même…

Ce n’était pas facile, aussi !
Il restait là, l’arme toujours planté dans son abdomen…
Fais quelque chose au moins !
N’importe quoi mais… enlève ça quoi…

Et puis, il continuait avec ces idioties de « mon ange » et tout ça alors que ce n’était franchement pas le moment idéal pour faire son intéressant.
J’avais bien compris qu’il était fort et qu’il savait lutter contre la douleur et même se tenir debout avec un pieu dans le corps mais… mais maintenant il était largement temps de l’enlever !

Je ne me l’expliquais pas mais… j’avais du mal à supporter cette vision…
C’était bien au delà d’être mal à l’aise…
Je m’inquiétais pour lui ?
… … …
Mais c’était pas vrai !
Qu’est-ce qu’il m’arrivait avec ce vampire ?!


« - … ravi que tu… m’appelles enfin par mon prénom… »


… …
Idiot !
Comme si c’était le moment !
On se fichait bien de ça pour l’heure !
Mais s’il tenait vraiment à parler de ça, je pouvais toujours lui dire que c’était juste une exception, que c’était la première et dernière fois que je le ferais et qu’il n’avait pas intérêt à s’y habituer.
Mais mon mauvais caractère pouvait attendre… au moins le temps qu’il se retire ce bout de bois toujours logé dans sa chair.

Un morceau de bois qui aurait sans aucun doute tué un humain normal…
D’ailleurs un humain n’aurait jamais su tenir debout, il se serait effondré et se serait vidé de son sang… fin de l’histoire.
Mais il n’était pas comme les autres, heureusement… pour lui, bien sûr !

Tout ça pour dire que je préférai garder le silence, incapable de dire quoi que ce soit ou de faire autre chose que d’observer, déglutissant péniblement et l’air presque choqué, ce corps étranger dans sa peau.
Il faut dire que mon impétuosité avait complètement disparu brutalement face à ce spectacle des plus inattendus.

Que s’était-il passé ?
Où avait-il bien pu aller pour revenir dans cet état ?
Et surtout… qui lui avait fais ça ?
Je n’avais entendu personnes, pas de bruit de bagarres alors quoi ?
Des réponses assez fuyantes pour l’instant…
Et des questions que je n’avais pas la force de poser.
Je savais qu’il ne pouvait pas mourir et aussi que ça aurait probablement été une bonne chose d’ailleurs… cependant… je me sentais mal sans raison logique.

A son tour, il examina l’étendue des dégâts.
Il avait eu de la chance… ce n’était certainement pas passé loin…
C’est alors que sa main agrippa l’arme… ce qui me procura un certain soulagement.
Il allait l’enlever et après… après je pourrais prendre mes esprits et chasser cette… cette compassion qui n’avait rien à faire là.

Serrant les dents par avance, la mine crispée par sa propre douleur, je le vis lever les yeux au ciel.
Bonne technique.
Mieux valait ne pas regarder et faire ça d’un coup sec… c’est du moins ce que j’aurais fais… à la différence que moi, je serais peut-être déjà morte à sa place.
Faire ça soit même ne devait pas être simple en tout cas mais, honnêtement, j’aurais été incapable de lui venir en aide.
Je me morigénai pour ça, me trouvant « nian-nian » sur ce coup là mais… je n’avais pas l’habitude de ce genre de vision, voilà tout !
Plutôt comique pour quelqu’un qui tuait des vampires sans le moindre scrupule, non ?
Mais de toute manière, il ne me le demanda pas, ce qui régla définitivement la question.

En effet, il ne s’offrit pas le répit et l’angoisse d’un décompte et se l’arracha brusquement.
Un cri de douleur, qu’il tenta pourtant d’étouffer, retentit me faisant frémir intérieurement.
Nouvelle bouffée de compassion…
Pour ma part, je n’avais pas bronchée, le scrutant avec intérêt, me demandant s’il allait déjà mieux.
Pour un humain, ça n’aurait pas été le cas, pas aussi rapidement mais… on disait que les vampires cicatrisaient très vite… j’ignorais cependant si c’était immédiat ou si ça prenait un peu de temps.
Un atout supplémentaire pour ces démons, un atout que j’aurais pu maudire mais que je félicitais cette fois.

Oui parce qu’en plus d’être capable de prodige et d’être immortels, ils étaient quasiment invincibles.
Le seul truc à faire c’était de les planter avec précision dans le cœur avec une arme en bois… tout le reste était inefficace, hormis bien sûr le feu ou le soleil…
Mais personnellement, j’étais de la vieille école et je prônais plutôt les bonnes vieilles méthodes armées…
Là encore, c’était plus rapide…
Mon frère en revanche avait incendié un vampire un jour, je n’étais pas restée pour voir ça trouvant ça presque… cruel…

Bref, il s’en remettrait.
J’ignorais à quelle vitesse mais le fait était là.
Et… le soulagement que m’apportait cette idée aussi.
Peut-être que je me sentais redevable depuis qu’il m’avait sauvé la vie… ça aurait pu expliquer mon désir de le « garder » en vie… non ?

Quoi qu’il en soit, son visage se détendit presque aussitôt… ce qui était plutôt réjouissant en soit.
Il avait l’air apaisé en tout cas, ce qui me laissait à penser qu’il ne lui faudrait pas bien longtemps avant de s’en remettre complètement.
Bonne ou mauvaise chose ?
Ça l’avenir nous le dirait… tout comme il m’apprendrait si j’avais bien fais de ne pas m’en prendre à lui.

En revanche, un peu de son sang imbibait à présent son tee-shirt et… j’avais du mal à en détacher mon regard.
Un intérêt un peu malsain sans doute mais… c’était la première fois que je voyais un vampire saigner.
D’ordinaire, ils tombaient en poussière et point final.
Alors là… disons que ça titillait ma curiosité.
Je veux dire… il saignait comme vous et moi et… il avait eu mal comme n’importe qui… okay moins que n’importe qui mais tout de même…
Encore quelque chose qui tendait à me rappeler aux résidus de son humanité…


« - Un cadeau de ta part ? … trop aimable Kailey, vraiment… » Me tira-t-il de ma rêverie, un sourire rieur aux lèvres.


…
… …
… … …
Au moins, il avait l’air d’aller mieux.
Il souriait même alors c’était plutôt engageant.

Par contre… Non !
Je n’y étais pour rien du tout cette fois !
Cependant, il n’avait pas l’air d’y croire non plus… ou alors il était réellement maso…
Il plaisantait… mais pour ma part j’étais encore un peu trop secouée par tout ça pour pouvoir m’en amuser réellement.

Apparemment, il s’agissait d’un piège et ce n’était pas trop mon registre ça.
Je préférais assister à l’ouverture du cadeau, si vous voyez ce que je veux dire.
Sinon, ça n’avait rien d’exaltant.
Et puis qui aurait été assez fou pour poser un piège par ici ?!
N’importe qui aurait pu tomber dessus !
Il y avait même plus de chance pour que ce soit un humain qu’un vampire qui passe par là alors… c’était inconsidéré et complètement inconscient !
En y réfléchissant, on avait tous eu de la chance que ce soit Luca qui tombe dedans !
Son inattention avait probablement sauvé la vie de quelqu’un !

En tout cas, ce n’était pas drôle… et franchement inquiétant.
D’ailleurs pour ma part, je me renfrognai.
Pas sous l’accusation, hein… ça je m’en fichais, j’avais la conscience tranquille.
Mais l’idée que quelqu’un puisse avoir posé un tel piège avait de quoi me tracasser et me contrarier.
Et plus encore le soupçon affreux qui s’immisça en moi…

Matt ? Est-ce que… Est-ce que ça pouvait être lui ?
Il avait parfois tendance à agir avant de réfléchir, surtout quand il était question de vampires mais à ce point là ? … Non, je ne le pensais pas… je ne l’espérais pas serait plus exact.
Toutefois, il était tellement imprévisible ces temps-ci, tellement à cran que je… j’avais vraiment peur que mes craintes soient fondées.
Je lui avais dis que je ne le reconnaissais plus c’est vrai mais… j’avais confiance en lui.
Il n’aurait jamais fais de mal à un humain de manière volontaire.
Alors si c’était vraiment lui… il n’avait pas du penser à cette possibilité…
Je… je préférais me dire qu’il s’agissait de bêtise plutôt que… que de n’importe quoi d’autre.
Néanmoins, je ne devais pas me prononcer trop vite.
Je ne pouvais avoir aucune certitude.
A Campfield, il y avait peut-être d’autres personnes au courant, des personnes moins scrupuleuses que nous après tout !
Donc avant de l’accuser, j’allais devoir trouver une preuve irréfutable qui dénoncerait le coupable.

Bref.
Ma méditation ne put pas aboutir, brisée par le mouvement de l’être nocturne qui s’approcha de moi et qui… s’approcha encore…
Il était vraiment près… vraiment trop près, si vous voulez mon avis.
Toutefois, je gardai le silence, ne sachant trop quoi dire après ce qui s’était passé et étant une nouvelle fois légèrement troublée par sa proximité.
Grâce au ciel, il prit la parole, m’évitant ainsi d’avoir à le faire.


« - Le pieu est une bonne arme… mais ça marche mieux… à cet endroit là… » M’informa-t-il lentement.


A cet endroit là ?
Quel en…
Je n’eu même pas le temps de formuler mentalement ma question qu’il leva le pieu à hauteur de ma poitrine.
Oh… heu… oui en effet… c’était plus efficace…
J’ai bien compris, merci…

Mais il ne s’arrêta pas là, pointant l’arme vers moi avant de la presser entre mes seins m’arrachant un frisson indicible et indésirable.
Une bouffée de nervosité s’empara de moi.
Je… j’étais là, interdite, vaguement effrayée, le fixant avec une certaine incompréhension tandis que mon cœur s’accélérait malgré moi.
Que… que voulait-il au juste ?
Et que… que comptait-il me faire ?
Pourquoi… Pourquoi faisait-il ça ?!

J’aurais voulu parler, protester mais ma gorge était étrangement nouée.
Ma position était loin d’être rassurante et mon interlocuteur l’était encore moins…
Un faux mouvement et…
Je retins ma respiration à cette idée, essayant de me raisonner et de ne pas paniquer.
Ce qui, entre nous, n’était pas simple.

Il avait droit de vie et de mort sur moi…
Oh, il l’avait toujours eu.
Lors de notre première rencontre, ça avait déjà été comme ça.
S’il le décidait il pouvait me mordre, me briser la nuque ou… faire en sorte de me tuer, quoi…
Mais là… là c’était encore le stade au dessus !
Il me… il me « menaçait » de cette arme et je… je n’avais aucun pouvoir de l’en empêcher ou de lui échapper.
Il n’avait plus grand-chose à faire pour mettre un terme à tout ça…
Il s’offrait encore une fois, une domination absolue…

Que cherchait-il au juste ?
A me faire peur ?
Pourtant… pourtant son regard n’avait rien d’agressif ou de vicieux… encore moins de sadique.
Il était animé, certes, mais par rien de tout cela…
Personnellement, j’avas du mal à m’en détacher.
Et… est-ce que sa bouche laissée entrouverte était encore une de ses provocations ou ne s’en rendait-il pas compte… ?
Moi, en revanche, je m’en rendais bien compte et luttais pour ne surtout pas revisualiser la scène de mon rêve !


« - Tu veux savoir ce que ça fait… ? » Me « proposa »-t-il soudain.


Heu…
Et bien… non… pas trop, en vérité.
Pas du tout même !
C’est gentil, hein mais… une autre fois peut-être !

Je… je n’avais aucune envie de savoir.
La démonstration était bien suffisante à mon goût !
Suffisamment stressante, surtout…
Et… je… est-ce qu’il sous-entendait me le montrer… complètement ? …

A cette idée ce fut la débandade pour mon cœur.
Je… je n’avais aucune envie de mourir !
Encore moins de cette façon là !
Je veux dire… ça aurait été plutôt comique non ?
Une chasseuse qui se fait tué d’un pieu en bois dans le cœur… original, non ?

Est-ce que qu’il voulait me donner une leçon ?
Me… me « punir » de m’en être pris à ces frères de cette façon ?
Voulait-il que je sache ce qu’ils avaient pu ressentir avant que je ne leur ôte ce semblant de vie qu’ils menaient ?
Qu’est-ce que j’étais censée comprendre ?!
Souhaitait-il me terroriser ou même… se venger ?
Avait-il réellement l’intention de le faire ?!
Il n’allait quand même pas me… me tuer de cette manière !
Je… je n’avais rien fais !
Pour lui, peut-être que si mais… mais je…
…
Est-ce que c’était pour ça qu’il était venu ce soir ?

Je… je… je n’avais rien fais !
Ce n’était pas ma faute cette fois !
Le pieu dans son ventre, je n’étais pas responsable !
Ce n’était pas à moi qu’il fallait s’en prendre pour ça !

Voilà à peu près ce que j’avais envie d’hurler pour essayer de retenir sa main… mais je ne le fis pas, incapable de prononcer le moindre mot.
Je fus d’ailleurs surprise du sang-froid que j’affichais…
Oh je n’en menais pas large et ça devait se voir mais aucune larme ne me monta aux yeux, aucun cri à la gorge.
Je restais stoïque comme… attendant mon destin ou je ne sais quelle connerie.
De toute façon, si je devais mourir autant le faire avec fierté et dignité.
Larmoyer ne servirait à rien s’il avait véritablement décidé de m’assassiner.

Je me contentais de le fixer, le regard habité mais en tentant de ne pas afficher mon affolement.
J’aurais pu aussi lui dire que je n’avais aucune envie de savoir mais honnêtement j’avais conscience que ce n’était qu’une question en l’air.
Les yeux dans les yeux, je sentis bientôt la pointe s’enfoncer très légèrement entre mes seins…
Je me rappelle avoir vaguement prié pour que, s’il le faisait, ça ne me fasse pas trop mal…

Et bizarrement, ma peur laissa place à… une certaine excitation…
Je savais… je savais que ce pieux était capable de m’ôter la vie, de tout faire disparaître…
Et j’avais très peur mais… j’avais plus que jamais l’impression que la vie ne tenait… ne tenait vraiment qu’à un fil…
C’était triste et terrifiant… mais je trouvais ça… presque beau en un sens…
Je dois vous sembler bizarre, non ?
Mais… c’était…


« - Intense n’est-ce pas… ? » Souffla-t-il doucement.


Oui…
Oui, c’était très intense.
Comme le prouvait mon souffle court.
Mon sang bouillonnait dans mes veines et une part de moi se récriait violemment contre l’idée de mourir mais… bizarrement être menacée de mort me faisait me sentir plus vivante que jamais… et je… je savourais pleinement cette sensation.

C’était ça…
C’était exactement ça que je cherchais en chassant… frôler la mort pour me sentir vivante… « humaine »…
Mais je n’avais jamais été si près…
Sauf peut-être lorsqu’il m’avait immobilisé trois jours plus tôt mais alors j’étais trop furieuse pour que ce sentiment puisse me pénétrer comme il le faisait maintenant.

Je… je n’étais pas « normale », si ?
Est-ce que c’était normal de se sentir aussi bien et aussi mal à la fois ?
D’être ainsi grisée par le danger ?
Je l’ignorais mais ça me faisait presque plus peur encore que le pieu logé entre ma poitrine.

Cependant, il ne poursuivit jamais son geste, s’arrêtant miraculeusement là.
Il n’avait pas l’intention de me blesser… comme je l’avais pressenti un peu plus tôt à travers son regard…
Je m’étais laissée avoir par ses mots mais j’avais la… la demi-certitude que si je m’étais uniquement concentrée sur ses yeux, j’aurais compris que ses intentions n’étaient ni de se venger ni de me châtier comme je me l’étais brièvement imaginer.

Je le regardais donc, hypnotisée par ses prunelles autant que par la situation…
Malheureusement, il rompit alors notre échange visuel… assez vivement je dois dire.
Ce qui me fit revenir à moi presque… douloureusement.
Disons que c’était trop soudain pour moi… et que je ne comprenais pas pourquoi il semblait avoir fui mon regard.

Quoi qu’il en soit, la pointe du pieu s’éloigna, me permettant de respirer plus sereinement certes mais générant en moi une certaine… frustration ?
Ça ne tournait vraiment par rond chez moi lorsque j’étais avec lui !
Je n’eu pourtant pas le loisir d’approfondir cette réflexion puisqu’il me donna l’objet qui l’avait traitreusement attaqué…

Il me fallut moins d’une seconde d’hésitation avant de m’en emparer.
C’était plus sûr, plus rassurant, du moins.
Etre démuni ne me réussissait pas comme nous venions d’en avoir la preuve une fois de plus.
Cependant, même si je ne crachais pas dessus, je… je ne pensais pas en avoir besoin…
S’il avait voulu me tuer il en avait largement eu l’occasion… mais il ne l’avait pas fais.
Et comme j’étais résolue à ne pas attenter à sa vie pour le moment… disons que je doutais que cette arme puisse me servir cette nuit.

Oui mais voilà, il n’était pas censé le savoir ça.
Alors je trouvais ça… risqué.
C’est vrai, il était blessé et de ce fait vulnérable… du moins plus que d’habitude…
Et je restais une chasseuse qui lui avais plus d’une fois fais comprendre qu’il n’était qu’un indésirable…
Me redoutait-il si peu ?
Non… enfin si mais je ne pense pas qu’il était question de ça entre nous…
Non je ne voulais pas dire entre nous !
Je voulais dire que j’avais plus l’impression qu’il s’agissait d’un accord tacite.
Tu ne me tue pas et je ne te tue pas…

Mais même malgré ça, je… « Je n’ai jamais vu de vampire aussi inconscient ! »
Une réplique que j’aurais pu lui lancer en toute sincérité et encore je n’avais pas tout vu.
En effet, il fit… volte-face… m’offrant son dos et une possibilité inespérée de m’en prendre à lui.
Pourtant, je n’esquissai pas le moindre geste et le laissai s’éloigner tranquillement.
Je laissais passer une occasion en or et je le savais pertinemment.
Ma part de chasseuse s’agitait désespérément, furieuse de ne pas pouvoir s’exprimer et saisir cette chance unique… mais ma part humaine m’empêchait toutes tentatives de lui nuire.
Et puis… ça n’aurait pas été très fair-play.
Il était blessé et tout ça alors… la « gloire » que j’aurais pu en tirer aurait été largement ternie.
Qui a dit que les chasseuses n’étaient pas loyales ?!
Ou qu’aucune ne l’était plutôt… ?

Je détournais donc mon attention de son dos, refusant de trop me « tenter » non plus.
Je posai alors la main sur mon cœur qui palpitait encore de ma récente frayeur-excitation.
Pas de doute là-dessus, j’étais bien vivante…
Cependant quelque chose attira mon attention… une légère sensation d’humidité sous mes doigts.
Je retirai donc ma paume, la portant à hauteur de mon visage pour constater que… que j’avais un peu de sang sur les doigts.
Il me fallut un petit moment pour comprendre qu’il y en avait sur mon tee-shirt…
Du sang de vampire… du sang qu’avait fait couler le pieu que je tenais à la main.

L’espace d’une seconde, j’eu envie de le jeter au sol néanmoins je me repris rapidement.
Jeter son unique arme uniquement pour un peu de sang était tout à fait ridicule !
Même pour du sang… non humain, dirons-nous…

Serrant le poing dont les doigts étaient légèrement salis comme pour tenter de l’oublier, je soulevais donc le pieu à hauteur de mes yeux.
J’observai une seconde le liquide vermeille qui en recouvrait la pointe ne sachant pas vraiment ce que ça m’inspirait quand quelque chose attira mon attention.
Quelque chose qui me glaça le sang… quelque chose de familier.
Une gravure… une lettre gravée plutôt.
Sans attendre, je le rabaissais, refermant ma prise sur lui.

Un « J »…
Un putain de « J » !
C’était une des obsessions de Matt…
Sur chacun de ces pieux, il gravait cette lettre.
J pour Jenna, notre mère…
La sienne tout du moins…

Il prétendait que c’était pour dédier ses « victoires » à cette femme qui restait presque inconnue pour moi…
Une idée venue probablement de Garret…
Je ne lui avais jamais reproché.
C’était sa manière de vivre sa vengeance, de faire son deuil… même si en un sens je savais que Garret l’avait empêché et l’empêcherait toujours de pouvoir vraiment le faire.
Je me disais qu’au moins il avait une raison d’exterminer les vampires alors que je n’avais pas tellement mon mot à dire moi dont les motivations restaient encore floues.

Mais ça… ce piège…
Si quelqu’un d’autre était passé dessus ça aurait été… un meurtre, plus une vengeance…
J’allais devoir avoir une sérieuse discussion avec lui et cette fois pas question qu’il se défile !
C’était… c’était vraiment grave, cette fois !
Je ne pouvais pas juste fermer les yeux comme je le faisais généralement lors de ses petites incartades !

Finalement, il avait faillis accomplir sa mission, détruire sa cible sans même savoir qu’il l’avait fais…


« - Pour la vitesse… » Lâcha-t-il me faisant imperceptiblement sursauter.


Que ? Quoi ?
Je… j’avais totalement perdu le fil de notre conversation et de mes pensées, obnubilée par ma découverte et par la culpabilité de mon frère.
J’avoue qu’entre ça et tout ce qui s’était produit avant, j’étais quelque peu chamboulée.
Je reposais donc les yeux sur lui.
Il était toujours dos à moi…
Tant mieux, ainsi il n’avait pas du percevoir mon trouble ni rien remarquer d’anormal…

Qu’avait-il dit alors ?
La vitesse ?
Quelle vitesse ?
… …
Oh oui ! Celle sur laquelle il m’avait interrogé, me proposant d’en parler à une oreille compréhensive…
Oui ? Et bien quoi ma vitesse ?(/color]


[color=black]« - … tu arrêtes souvent… les mains qu’on tente de te mettre aux fesses… avec un réflexe aussi… inhumain ? » Fit-il sans se retourner.


…
… …
… … …
In… inhumain ? …
Que… Qu’est-ce qu’il voulait dire par là ?
Je… je n’avais rien d’inhumain !
J’étais… j’étais une jeune fille comme les autres !
Peut-être que j’étais un peu bizarre mais je n’étais pas un monstre !

Qui était-il pour dire ça lui qui était mort et « ressuscité » ?!
Lui il était inhumain, pas moi !
Moi j’étais une serveuse comme il y en avait des tonnes, certainement pas une anomalie de la nature !

Et mes reflexes étaient tout à fait normaux, en plus !
Ils étaient bien développés, c’est vrai, mais ça ne faisait pas de moi un… un être inhumain !
La nuit, j’étais physiquement légèrement meilleure, mes sens et réactivité mais ça ne voulait rien dire du tout !
Il y avait beaucoup, beaucoup de gens comme moi !
Et ils étaient tout ce qu’il y a de plus normal !

Je… je n’étais…
Rah ! De quel droit se permettait-il de me faire ce genre de réflexions ?!
J’avais empêché cet homme de me peloté, je n’avais rien fais de mal, si ?!
Alors… alors j’aurais du être contente de moi pas me sentir soudain… honteuse d’y être parvenue…
Je n’étais pas un monstre, je n’étais pas une sorcière, je… je n’avais strictement rien à me reprocher !

J’avais des amis, j’étais parfaitement intégrée à la société, est-ce qu’il pouvait en dire autant ?
Quant à ce don de voyance que j’avais, je savais le contrôler maintenant !
C’est à peine si j’avais vu quelque chose au cours de ces trois derniers mois…
Luca et sa Vampirela mis à part…

Mi-blessée, mi furieuse, je le vis alors se retourner et me gratifier d’un sourire joueur.
Que…
C’était quoi cet air ?
Je n’eu pas l’opportunité de m’interroger plus en avant puisqu’avant même que je ne réalise qu’il n’était plus en face de moi, je le sentais dans mon dos.
Même s’il m’avait parut moins rapide… mais bon tout est relatif quoi…
Moins rapide, peut-être mais toujours beaucoup trop pour que je puisse le suivre.

Quoi qu’il en soit, avant que je puisse réagir, je sentis sa main s’abattre sur… mes fesses…
… Et ben, tiens…
Encore une fois, il était atrocement sans gêne et son geste indécent me fis me souvenir à quel point je le détestais… ce qui en fin de compte n’était pas un mal.
Le corps raidit, je serrai les dents, me retenant à grand peine de faire volte face et de lui renvoyer l’appareil… mais sur le visage si vous voyez ce que je veux dire.
Quel goujat ! Quel… quel personnage odieux !


« - Mais visiblement… tu es encore loin d’être aussi rapide… qu’un vampire… blessé en plus… » Lança-t-il, désinvolte.


… Evidemment que je n’étais pas assez rapide.
Il fallait déjà le faire pour égaler la vitesse d’un vampire, blessé ou non.
Même mourant il m’aurait distancé sans problème…
J’avais des bons reflexes mais… dans la mesure du possible quoi… dans la mesure de l’humain…

D’ailleurs pour un vampire blessé, je le trouvais particulièrement enquiquinant.
A peine remis de sa blessure qu’il se permettait de me toucher et de me provoquer !
Finalement, je le préféré avec un pieu dans le ventre, il était un peu plus calme…

Il vint bientôt se replanter face à moi, m’offrant un clin d’œil à la fois charmeur et à la fois provocant.
J’ignorais comment il s’y prenait pour réussir à m’inspirer les deux à la fois mais… c’était le cas.
Toutefois, je n’allais pas me laisser… charmer justement, par une si piètre performance !
Il fallait un peu plus qu’un clin d’œil pour m’amadouer, tout de même !

Au moins, il avait l’air de s’amuser en me « provoquant » et en me… taquinant si on peut appeler ça ainsi.
Moi moins déjà.
Je ne tenais pas à laisser filer une seconde fois ma rancœur !
Elle était trop précieuse !
Résultat, je tentais de me concentrer sur le geste et son inconvenance plutôt que sur l’idée qu’il « jouait » sans réelles mauvaises intentions.

Il s’éloigna ensuite de moi et je ne m’en plaignis pas.
Plus il était loin et plus j’étais lucide.
Cependant la distance ne l’empêcha pas de me détailler tranquillement une fois que je fus à nouveau dans son champ de vision…
Grr…
Heureusement pour lui que son sourire avait l’air sincère !


« - Et pour ce Chris là… je suis jaloux. » Admit-il à brûle pourpoint me prenant nettement au dépourvu.


Jaloux ?
Alors j’avais visé juste ?
J’aurais préféré que ça ne soit pas le cas…
Les vampires pouvaient véritablement être jaloux… ?
Etrange étant donné qu’il ne tenait réellement à personne…
Il devait plus s’agir de possessivité alors…
Mais la nuance était mince, je l’admets.

Sauf que… s’il savait le pauvre !
Il n’y avait aucune raison d’être jaloux de mon ami !
Je l’adorais et tout ça mais… il ne serait jamais rien d’autre que mon bon copain…
Tout comme Luca ne serait rien d’autre que le vampire qui m’avait sauvé, par exemple…


« - J’ai détesté te voir avec un autre garçon… » Poursuivit-il dans le registre des confidences.


…
… …
… … …
Oulà…
Qu’est-ce que je devais comprendre ?
Je n’étais pas certaine de vouloir le savoir…

Il avait détesté me voir avec un autre garçon ?
Comment ça un autre ?
Ce n’était pas comme si j’étais avec lui…
D’ailleurs je connaissais Chris depuis que j’avais quatorze ans alors c’était plutôt à lui de dire ce genre de phrase.
Surtout que lui ne m’avait pas traité comme si j’étais sa petite copine alors que je ne l’étais pas…

En plus c’était différent !
Chris avait des sentiments pour moi, j’en avais bien conscience.
Mais Luca… vu comme il avait dis ça, on… on aurait presque dis l’aveu d’un amoureux.
Sauf qu’il était incapable de l’être…

En fait, ça me faisait peur…
Je ne voulais pas d’une relation avec ce vampire et encore moins dans ce genre là… celle qui vous rend jaloux, je veux dire.
D’autant qu’il aurait tôt fait d’éliminer son rival… et pas d’une façon très correcte… éliminer dans le sens le plus radical du terme, si vous voyez ce que je veux dire…

Tout ceci soulevait une question importante et laissé en suspend jusqu’ici.
Qu’attendait-il de moi ?
Ce n’était pas comme Chris qui espérait contre toute raison sortir avec moi alors quoi ?
En plus, je n’avais rien fais qui puisse susciter en lui quelque chose capable de le rendre jaloux !
Au contraire, j’avais tout fais pour le repousser et n’avais pas lésiné sur l’agressivité et la froideur !
Déjà je trouvais louche le fais qu’il ait « tenu » à me revoir mais ça phrase… disons qu’elle sous-entendait une chose que je n’étais clairement pas prête à accepter.

Les vampires n’avaient pas de sentiments !
Mais si lui s’imaginait en avoir… pour moi qui plus est… alors ça allait me créer de gros problèmes étant donné que j’avais décidé de ne pas le tuer…
Il était déjà venu sur mon lieu de travaille et je trouvais qu’il s’agissait là d’une intrusion monumentale dans mon existence alors je… je ne tenais pas à ce qu’il réitère ça…

Je voulais juste l’oublier et qu’il m’oubli lui aussi…
Ce n’était pas trop demander, si ?!
Il y avait des tas d’humaines prête à fantasmer sur un immortel alors pourquoi n’allait-il pas gentiment les voir ?
Pourquoi se serait-il embêter avec moi ?
Ce n’était pas comme si j’étais particulière hormis mon statut de chasseuse, je veux dire…


« - … surtout quand celui-ci a ton âge… alors que je suis un vieux de 128 ans… » Ajouta-t-il avec ce qui ressemblait à une bonne dose de franchise.


Ou… Oui…
Dis comme ça en effet…
C’est le destin, mon gars, tu es bien trop vieux pour moi !
Un siècle et onze ans de plus… ?
Non, décidemment, désolée mais ça ne pourra pas coller.
Trop grande différence de mentalités et de générations, tu vois…
T’imagine un peu les problèmes de compréhension dans un couple avec plus de cent ans d’écart ?

En vérité… j’étais assez désorientée.
Je savais que les vampires étaient immortels mais… c’était vieux, tout de même.
Et il y avait une différence entre le savoir et se l’entendre dire tranquillement, comme une vulgaire banalité.
Il m’aurait dis j’ai vingt deux ans qu’il aurait employé le même ton.
Oh bien sûr, il aurait pu avoir cinq cent ans que ça n’aurait pas changé grand-chose, physiquement il serait resté le même mais tout de même !
Je faisais ridicule avec mes dix-sept printemps, franchement…
Il avait du en voir des choses en un siècle… en tuer des gens aussi, mais je préférais éviter ce genre de pensées par contre.

Un minuscule rire lui échappa à nouveau… et me fit exactement le même effet.
J’aimais ce son… c’était assez apaisant et suffisamment rare pour être presque communicatif.
Je m’efforçai cependant à garder mon sérieux, songeant à cette révélation qu’il venait de me faire sur son âge.
Sans doute était-il loin d’être le plus vieux des vampires… mais pas le plus jeunes non plus…
Mais imaginez-vous un peu, à mes yeux, c’était comme de discuter avec… mon arrière grand père qui aurait gardé sa jeunesse d’antan.
Un peu troublant, en somme.
Et j’avais du mal à le réaliser.


« - … mais tu comprendrais ma jalousie… si tu savais combien tu es sexy dans cette tenue… » Conclut-il dans un souffle comme s’il venait de me dire un secret, s’éventant avec sa main.


Arf…
Pas croyable ce type !
Il n’était pas capable d’être sérieux une minute ?
Remarquez quand il l’était il prétendait que j’avais des reflexes inhumains et tout ça donc bon…

Alala…
Voilà qu’un vampire me complimenter sur ma tenue en me disant sexy !
C’était le monde à l’envers.
Ce n’était pas le genre de discours que l’on attendait de l’un de ses ennemis jurés !
Et pourtant, je ne rêvais pas…

De plus, c’était assez embarrassant…
S’entendre dire ça de la sorte… c’était plutôt inhabituel !
Il n’y avait qu’un homme dénué de moralité pour dire ça aussi ouvertement !
… Quoi ?! Je vous rappelle que je vivais dans un trou paumé en pleine campagne et que je ne côtoyais que très rarement la ville et les garçons en général.
Je ne pouvais pas imaginer la mentalité des citadins non plus…

D’ailleurs vampire ou pas est-ce qu’il se permettait de dire des choses comme ça à son époque ?!
Bonne question…

Je le gratifiai alors d’une mine réprobatrice et presque blasée avant de lever brièvement les yeux au ciel.


« - Comme se fait-il que, même blessé, tu sois si exaspérant ? » Commençais-je alors un agacement… dont je n’étais pas totalement certaine qu’il soit feint ou véritable.


Je le pensais.
Même blessé il était capable de m’irriter en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire…
Et pourtant, j’avais bien eu de la compassion pour lui… j’en avais même encore quelques résidus.


« - En fait, je suis déçue… Moi qui pensais qu’à ton époque le romantisme était de mise… tu viens de briser tous mes rêves… » Soupirais-je avec… humour ?


Mais qu’est-ce qu’il me prenait d’un coup ?!
Ça n’allait pas du tout là !
Je me morigénai tentant de ne pas rester sur ce registre là.
J’ignorais d’ailleurs ce qui m’y avait conduit… son rire peut-être…
Et pourtant, son discours sur sa jalousie m’avait vraiment refroidie mais je… je ne sais pas, peut-être un besoin de décompresser…
M’enfin on pouvait toujours prendre ça comme un reproche sur sa façon de se comporter donc… ça pouvait aller malgré tout.

Je me repris donc tant bien que mal, poussant un petit soupir tout retrouvant une mine plus fermée et distante.


« - En tout cas, si tu veux tout savoir, Chris est un garçon génial… très… »


Je m’interrompis, indécise.
Très quoi ?
Je n’étais pas sûre de ce que je voulais dire…
Mais finalement l’idée me frappa d’un seul coup.


« - … très humain. » Conclus-je tranquillement.


Pourquoi je lui disais ça ?
Pour… l’éloigner de moi, tout simplement.
Je voulais lui faire comprendre que sa jalousie n’avait pas lieu d’être puisqu’il n’y aurait jamais rien entre nous hormis une forme d’animosité.
Et je doutais que ça puisse l’atteindre étant donné qu’il n’avait pas réellement de cœur.
C’était juste pour… dresser une barrière supplémentaire entre nous.
Je ne voulais pas le rendre jaloux en disant ça, simplement lui ouvrir les yeux.
Lui vampire, moi chasseuse. Nous rien à faire ensemble.

De plus, je le pensais ce que je disais sur mon ami.
Je n’étais pas amoureuse de lui, certes, mais il avait pourtant toutes les qualités requises pour ce rôle… contrairement à Luca qui n’en avait aucune.


« - … Comme moi, d’ailleurs. » Ajoutais-je assez sèchement, le défiant du regard de me contredire.


Là, évidemment, je faisais référence à sa remarque désobligeance d’un peu plus tôt.
Il pensait ce qu’il voulait mais je savais bien ce que j’étais moi !

Je me mis alors en mouvement, m’avançant vers lui avant de m’immobiliser bien en face et de désigner d’un geste de la tête le pieu que je tenais fermement dans la main.


« - … Si j’avais posé un piège pour toi, soi sûr que je ne t’aurais pas manqué, moi. » Déclarais-je un peu hautaine, éprouvant malgré moi le besoin de me disculper.


Oui mais même si je tenais à ce qu’il sache que ce n’était pas moi, je ne devais pas oublier que je le détestais et que je ne tenais pas à faire ami-ami avec lui.
Du coup, je laissais toujours planer le doute quand à mes intentions de le tuer… même si je n’avais rien tenté ce soir…


« - D’ailleurs si j’étais toi, j’éviterais de m’offrir un pieu à chacune de nos rencontres… je vais finir par prendre ça pour une invitation… » Poursuivis-je tranquillement avec une assurance feinte pourtant bien contente qu'il le fasse.


Sans attendre, je fis quelques pas sans destination précise, me contentant de m’éloigner de lui.
En réalité, j’avais presque envie de lui demandais comment il allait mais… je craignais de me rabaisser… ou plutôt de dévoiler l’esquisse de la compassion qu’il avait généré en moi.
Après tout, ne lui avais-je pas dis qu’il ne serait jamais capable que de m’inspirer de la colère ?
Ça aurait été bête de se contredire maintenant…

…
J’étais… blessé…
…
Oui, c’était plutôt normal…
Bah j’vous rappelle que j’avais reçu un pieu en plein dans le ventre, alors fatalement…
Même si je m’estimais particulièrement chanceux que celui-ci n’ait pas atteint le cœur…
Un maudit piège d’une stupidité telle que celui-là, et mon existence pouvait s’arrêter…
Plus de moi, plus de vampire… mais plus de Kailey pour moi non plus…
Alors non, ça n’allait sûrement pas arriver !

Je ne comptais pas mourir…
Du moins pas comme ça… et surtout, pas si vite…
Non mais c’est vrai, je ne pouvais pas partir maintenant…
Ça commençait seulement à devenir intéressant avec ma chasseuse…

En tout cas, je crois que j’avais évité le pire…
Oui, parce que je n’avais pas tellement prêté attention aux termes que j’employais…
Inhumain…
Je l’avais quasiment traitée d’inhumaine…
De monstre, en quelque sorte…

Et ce n’était pas vraiment la chose à faire…
Je le savais…
Le allait se braquer, et se refermer plus encore alors qu’elle ne s’était même pas véritablement ouverte…
Et je…
Je ne voulais pas qu’elle soit blessée par mes propos…

Du coup, j’avais… détourné son attention de ça…
J’avais fait en sorte de dédramatiser le truc…
Genre ah oui, tu es plus rapide que la plupart des humains, mais tu n’arrives même pas à la cheville d’un vampire blessé…
Pour ce qui était de la main aux fesses, c’était pour trouver un contexte, rien de plus…
Enfin, y’avait bien un peu plus, mais…
Disons que c’était un besoin purement physique… qui me démangeait depuis un petit moment…

Mais je ne m’étais pas arrêté là…
Oh mon dieu non !
J’avais même avoué être jaloux de ce type là…
Ce Chris…
Mister Compréhensif, la tapette…
Je ne tenais pas à le lui cacher…
La voir avec d’autres hommes m’énervait… et je ne supportais pas l’idée qu’elle puisse préférer quelqu’un à moi…

…
… …
… … …
Dans le genre possessif, je me posais là hein…
Complètement taré…
Mais… je ne la voulais qu’à moi…
A moi exclusivement, et à personne d’autre…
Surtout pas à ce petit mec totalement amoureux d’elle, ça crevait les yeux…

Et maintenant, elle allait savoir mon âge…
Je n’y avais pas tellement réfléchi en le disant mais… ça allait peut-être être un sacré choc pour elle…
128 ans…
J’allais passer pour un vieux con quoi…

Mais désormais, trop tard pour revenir en arrière…
Mes mots avaient bien été prononcés, et je ne pouvais pas les reprendre…
…
Oui, j’avais beau posséder des dons extraordinaires, enfin, dans le sens « qui sort de l’ordinaire » hein… mais revenir dans le passé ou annuler une phrase que je venais de prononcer, je n’en étais pas encore capable…
Peut-être que ça viendrait avec le temps… qui sait ?

En tous les cas, cette blessure ne me réussissait pas… à moins que ce soit la demoiselle… ?
Parce que… qu’est-ce que je parlais !
Et c’est que j’en dévoilais des trucs en plus !
Là, je ne parlais pas pour ne rien dire…
Je sortais quand même des trucs importants.
Mais ça ne me gênait pas plus que ça.
Je souhaitais qu’elle sache tout ça, et je ne m’en cachais donc pas.

Mais maintenant, je ne pouvais qu’attendre de voir sa réaction…
Qu’allait-elle faire… ?
Comment allait-elle réagir… ?
J’avais parlé, parlé, et parlé encore…
Mais comment allait-elle prendre toute ça… ?

Surtout que d’ordinaire, elle prenait toujours mal ce qui venait de moi…
C’était comme ça hein…
Il lui fallait le temps de s’habituer…
Mais en attendant, elle semblait me haïr, quoi que je fasse ou quoi que je dise…
Je n’étais jamais tranquille…
Moi je ne cherchais pourtant pas à lui nuire, ni même à l’emmerder…

Mais elle devait avoir le sentiment que c’était ce que je faisais, puisqu’elle réagissait quasiment toujours de façon excessive… et agressive…
A croire que j’étais un… un vampire…
…
Bon d’accord, j’en étais un, je le reconnais !
Mais tout de même !
Je ne méritais pas ça parce que certains de mes compatriotes étaient des connards…
Un peu de considération, que diable ?!
C’était trop demander… ?

Je revins alors à la dimension, fixant ma chasseuse qui réagissait enfin à mes propos…
Et bien…
Ce n’était pas trop tôt mon ange…
Mais qu’est-ce qui allait découler de tout ça… ?

La jeune fille leva les yeux au ciel, une moue carrément blasée sur les traits…
Tellement que c’en était presque exagéré…
Et fatalement presque drôle du coup…
Un léger sourire se forma sur mes lèvres en observant son expression, attendant de savoir ce qui allait suivre…


« - Comme se fait-il que, même blessé, tu sois si exaspérant ? » Commença-t-elle alors, agacée.


…
… …
… … …

Euh…
C’était dit d’une façon amusée qui m’échappait, ou est-ce qu’elle était sérieusement agacée… ?
Pas facile à dire, même si j’optais plutôt pour l’agacement…

Et bien bravo…
Franchement, je ne m’attendais pas à ça…
Mais apparemment je l’agaçais…
Et aussi, j’étais… si exaspérant…
Ce qui ne jouait pas tellement en ma faveur, si… ?

Au moins, rien n’avait changé visiblement…
Je lui tapais sur le système continuellement…
C’était encore et toujours pareil…
Même si cette fois, je la sentais plus détendue…
Elle se faisait un peu à ma présence fallait croire…


« - En fait, je suis déçue… Moi qui pensais qu’à ton époque le romantisme était de mise… tu viens de briser tous mes rêves… » Poursuivit-elle, avec un humour certain.


…
… …
… … …

Oui, je ne rêvais pas, elle se faisait effectivement à ma présence là !
Il y a deux secondes, elle m’incendiait avec mon exaspération et…
Et là… elle plaisantait… ?
Waow…
C’était la première plaisanterie qu’elle s’autorisait avec moi…
C’était… agréable, et mon sourire s’élargit en conséquence…

De plus…
Hmm, elle n’avait pas tout à fait tort…
Enfin, à mon époque précisément, j’avais passé ma vie dans une ferme et n’avais jamais côtoyé le monde extérieur, mais comme vampire, j’avais toujours été exquis de romantisme, faisant craquer n’importe quelle demoiselle sous mon charme obscur…

Mais avec elle, j’étais plus direct…
Disons que…
Je savais pertinemment que le doux romantisme n’aurait aucun effet sur elle…
Elle se répéterait que j’étais un vampire, et verrait venir à trois kilomètres la moindre de mes approches…
Donc c’était peine perdue…

Pour la séduire elle, il fallait utiliser une méthode bien différente, et j’en avais conscience.
Les petits mots doux n’étaient pas le genre à la faire marcher, alors je devais me montrer lus direct, plus franc.
Je ne l’épargnais donc pas, et lui parlais ouvertement.
Il y avait ce quelque chose de vampirique… ou qui y ressemblait du moins… en elle, et il fallait provoquer ça, le stimuler, pour déchaîner sa passion… ou sa folie.

J’en avais bien conscience, et je comptais faire ce qu’il fallait pour qu’elle soit forcée de reconnaître cette part d’elle…
Cette sauvagerie que j’avais entrevu… cette chose qui restait bien cachée à l’intérieur.
Mais je savais également que ce ne serait pas facile… que ça me demanderait un travail acharné…
Alors pour l’heure, je jouais, la provoquais… bien décidé à ce qu’elle me montre ce qu’elle renfermait…

Malheureusement, sa mine se referma brutalement…
Soudain, fini la rigolade…
Moi qui l’avais pensée humoristique sur ce coup, je n’étais plus très sûr de moi…
…
Elle… se reprenait… ?

C’était insensé !
Comme si elle retrouvait ses esprits…
Comme si elle se rendait compte de son adoucissement, elle se refermait très brutalement…
C’en était presque cruel…


« - En tout cas, si tu veux tout savoir, Chris est un garçon génial… très… » Reprit-elle brusquement, avant de marquer un temps d’arrêt.


…
… …
Un garçon génial… ?
Alors dans ce cas, pourquoi vous n’êtes pas ensemble ?
Non mais c’est vrai ça !
S’il était aussi exceptionnel, elle ne le repousserait pas sans cesse comme elle l’avait fait ce soir, et elle ne me laisserait pas nous « afficher » devant lui comme ça…

Alors je…
J’avais un doute…
Pour être franc, je pensais connaître la vraie raison en fait…
Elle n’aimait pas ça…
Elle n’aimait pas ça parce qu’il était extérieur à son monde… et qu’il était trop gentil… trop normal…

Il fallait à Kailey quelqu’un qui connaisse son monde… quelqu’un d’aussi bizarre et d’aussi tordu qu’elle… voir quelqu’un du mauvais côté… un… vampire en l’occurrence…
Alors que ce Chris, il était trop…
Trop humain…


« - … très humain. » Se reprit-elle tranquillement.


…
… …
… … …

Oui, exactement ce que je disais…
En fait, elle donnait carrément la raison pour laquelle ça ne pourrait jamais coller entre eux…
Il était très humain…
Ce que n’était pas tout à fait Kailey… et ce que je ne serais plus jamais…

Il était donc quelqu’un de très humain…
Une sacrée qualité pour quelqu’un de sa race…
Mais ça ne changeait rien…
Kailey était… avait quelque chose de pas humain… et elle aspirait à autre chose…

C’est vrai, comment réagirait Chris s’il apprenait que Kailey chassait les vampires… ?
Mais pire que ça…
Comment réagirait-il s’il apprenait qu’elle ne s’était pas débattue alors qu’elle était à deux doigts de se faire mordre… ?
Et comment prendrait-il le fait que le pieu qui aurait pu la tuer l’excitait au point que son cœur fasse des bonds gigantesques dans sa poitrine… ?

Elle aspirait à des choses qu’il ne pourrait pas lui offrir…
La demoiselle était différente…
Plus proche de moi qu’elle ne le serait jamais de lui…
J’en avais l’intime conviction…
Cependant… elle n’était pas décidée à se laisser abattre sans lutter…
Certainement pas, ce serait très mal la connaître ça…
Elle aimait toujours batailler… enfin, sauf lorsque je venais la faire frissonner avec mes crocs à quelques millimètres de son cou…
Là elle se montrait d’une docilité incroyable…
Espérons que l’on pourrait rééditer la performance…


« - … Comme moi, d’ailleurs. » [color=black]Ajouta-t-elle sèchement en me toisant, le regard déterminé.[/

…
… …
… … …

Et bien…
Voilà qui aurait pu me remettre les pieds sur terre avec force…
Toutefois…
Je ne marchais pas dans son manège…
Son petit jeu ne m’aurait pas, car je n’avais pas été vampirisé de la dernière pluie…
Je la connaissais mieux que tous ces humains auxquels elle donnait le titre d’« ami »… qu’elle l’accepte ou non…

Pourtant, ça me… ça me faisait enrager…
Et ça me blessait… bien plus que le pieu n’avait su le faire…
Elle…
Elle mettait tellement d’ardeur à mettre de la distance entre nous…
Et je…
Je détestais qu’elle me traite comme si je n’étais qu’un indésirable !
C’était… aussi frustrant que blessant, j’dois dire…

Mais…
Elle se mentait à elle-même…
Je le savais… et elle finirait par s’en rendre compte…
Et puis…
C’est tout ce qu’elle trouvait pour mettre de la distance entre nous… ?
Le fait qu’elle était humaine et moi pas… ?

…
C’était un peu… faible, non ?
Vous croyez que des gens refusaient d’être ensemble parce que l’un était français et l’autre belge ?
Franchement, c’était un peu… ridicule comme excuse… (This is ridiculous !)

La demoiselle s’avança alors vers moi…
Et oui, que voulez-vous…
Elle avait beau râler, pester, et me dire que nous étions totalement différents, elle ne pouvait s’empêcher de revenir vers moi…
Elle se stoppa bien en face de moi, pleine d’assurance.

D’un geste de la tête, elle désigna alors le pieu qu’elle tenait dans la main…
Euh… oui ?
Vous désirez ?
… me le planter ou je pense ?!
Enfin, c’est indécent !
On ne plante pas un pieu dans le cul d’un vampire enfin !


« - … Si j’avais posé un piège pour toi, soi sûr que je ne t’aurais pas manqué, moi. » Avoua-t-elle, hautaine.


…
Donc, ce n’était pas elle…
Ce qui voulait dire qu’un autre chasseur de vampires rôdait pas loin…
…
Oh, mais suis-je bête…
Peut-être juste les tarés de copains de Miss Campfield là…
Ça serait pas étonnant de la part d’un groupe qui ose prôner la violence dans un lieu où elle est interdite et qui s’attaque à un super vampire au milieu de dizaines de ses congénères…
Une bande de tarés pareils serait bien capable de ça…

Et puis, elle ne m’aurait pas manqué… ?
Hmmm…
Elle voulait dire, comme elle ne m’avait pas manqué au Vamp Hyre ?
…
Si c’était ça, alors je n’avais pas vraiment à me méfier…

Oh, je ne vais pas mentir, je ne la sous-estimais pas…
Je savais qu’elle pouvait être très dangereuse…
Contrairement aux autres chasseurs, elle avait ce petit truc vampirique en plus qui faisait toute la différence…
Elle leur était supérieure…
Et en plus de ça, elle avait une dent contre moi… sans mauvais jeu de mot…
Mais j’avais… idiotement peut-être, confiance en elle… en nous.
Je ne la tuais pas, elle ne me tuait pas…
Sans qu’on se l’avoue, c’était un accord tacite entre nous deux.


« - D’ailleurs si j’étais toi, j’éviterais de m’offrir un pieu à chacune de nos rencontres… je vais finir par prendre ça pour une invitation… » Conclut-elle, sûre d’elle.


…
… …
… … …

Bon…
Ça re-détendait un peu l’atmosphère… et ce n’était pas plus mal…
Elle allait prendre ça pour une invitation hein… ?
Mais je t’en prie mon ange, approche…
Viens danser avec moi sous cette nuit étoilée !
( Mode Karl off xD )

Mais de toute manière, elle n’était pas moi…
Alors si je comptais la combler de pieux tous plus magnifiques les uns que les autres, elle n’aurait pas son mot à dire…
Je ferais bien ce que je voudrais, que ça lui plaise ou non…
En outre, je doutais qu’elle regrette mon geste…
Après tout, une chasseuse devait préférer être armée… non ?
D’accord, celle-ci avait quelques penchants bizarres mais… pas à ce point quand même… si ?

Kailey se mit alors en mouvement, se contentant de… s’éloigner…
Oui, elle avançait n’importe où, puisque dans la direction opposée à sa maison…
Juste, elle… elle s’éloignait de moi…
Et je trouvais ça… absolument nul.
Comme si elle avait besoin de me fuir !
Non mais franchement, fallait pas abuser non plus…

J’étais vampirique, mais lui avais-je donné une raison de me craindre… ?
Ou une seule raison de vouloir m’éviter ?
Là j’voyais pas…
Comment ça j’avais déjà fait fort en jouant avec la fermeture de son décolleté et en lui mettant une main aux fesses, sans parler des autres attouchements du bar ?!
C’était rien ça…
D’autant qu’elle n’avait jamais réussi à me convaincre dans sa manière de me repousser…
Enfin… quand elle m’avait repoussé évidemment…

Mais pour l’heure, je laissais ces considérations de côté…
Elle me… tournait le dos comme ça ?
…
Visiblement, elle avait pas mal confiance elle aussi…
J’aurais largement pu la mordre avant qu’elle puisse esquisser le moindre geste…
Mais… je ne le ferais pas… évidemment…
Quel gentleman, je m’épatais moi-même…


« - Donc tu n’as pas posé ce piège… » Commençais-je pensif. « … ça vient sans doute de tes deux acolytes, pas vrai… ? » Soupirais-je, inquisiteur.


…
Ah, j’étais fier soudain…
Oui, je me la pétais genre : je sais que tes deux potes sont tes équipiers, mais dans ma bonté extrême, je ne les attaque pas…
En réalité, si je ne les massacrais pas, c’était bien pour elle…
Elle n’aurait pas voulu, ni aimé que je le fasse… alors autant les laisser vivre…


« - Mais ça ne me regarde pas… » Me repris-je brusquement. « … par contre le romantisme, je ne sais pas… quand j’étais humain, j’ai passé ma vie à la ferme… alors à part les poules, il n’y avait pas grand-chose à charmer… » M’amusais-je de ma propre phrase, la ponctuant d’un rire discret.


…
Non je n’étais pas nostalgique !
Qu’est-ce que vous imaginez ?!
… c’est vrai qu’aujourd’hui encore, je regrettais notre petite vie de paysans…
Au moins, mon frère ne se serait pas fait tuer…
Il aurait bien fini par mourir de vieillesse, mais… comme nous tous…

Et moi, je lui disais ça comme ça…
Sans retenue, rien…
Après tout, il fallait bien faire connaissance aussi…
Et…
J’avais dit « quand j’étais humain »…

Oui…
Parce que pour moi, c’était le cas…
Je n’avais pas l’impression d’être une autre personne, sans âme ni rien, depuis que j’étais vampire…
J’étais le même, mais… en vampire…
En gros, j’étais toujours moi, sauf que je devais me nourrir de sang et que j’avais droit à l’immortalité… et l’immoralité, mais ça n’avait pas grand-chose à voir…

Lentement, je fis quelques pas en direction de la demoiselle, me rappelant ses phrases…
Et bien oui…
Repenser à ça m’y ramenait fatalement…
Chris et sa super humanité…
Contrairement à moi, qui étais tout simplement mort… mais bien vivant…


« - Toi dis-moi par contre… pourquoi… ? … parce que Chris est humain, ça signifie qu’il est meilleur que moi ?! » M’emportais-je légèrement, ne contenant pas toute ma colère face à cette « injustice ».


Je… détestais ça…
Qu’elle fasse jouer nos races pour me rappeler que je ne devais pas trop rêver…
Pour me tenir loin d’elle…
C’était bas… et c’était stupide…
Alors parce que j’étais un vampire, je ne valais rien ?
Parce que j’avais été vampirisé, on devait me traiter comme un monstre ?
C’était aberrant quand même !

Je tentais de retrouver mon calme…
Péter un câble ne mènerait absolument nulle part, et je devais garder les idées claires…
Surtout ne pas faire n’importe quoi…
Je restais donc immobile, soupirant longuement pour retrouver un semblant de sérénité… et de calme.

Je fis alors quelques pas, destinés à me ramener à moins d’un mètre, dans le dos de la demoiselle.


« - Mais tu as raison… il est très humain… et c’est pour ça qu’il ne pourra jamais te comprendre aussi bien que moi… » Soufflais-je, un sourire sincère aux lèvres.


Je le pensais…
Et c’est pourquoi j’étais si sincère…
Ces humains…
Ils ne savaient pas qui elle était… ce qu’elle cachait…
Moi… moi qui étais son ennemi… et qui ne la connaissait que depuis trois jours…
Je la connaissais mieux que n’importe lequel d’entre eux…

J’avançais de nouveau dans son dos, réduisant l’écart qui séparait encore nos deux corps… jusqu’à ce qu’il n’y ait justement plus le moindre écart, puisque je me collais langoureusement à elle, mes lèvres déposant un baiser sur son épaule, avant d’en déposer un autre plus près du cou…


« - Et à force de m’offrir si généreusement ton cou à chacune de nos rencontres, je vais finir par prendre ça comme une invitation… » Lui soufflais-je avec passion.


J’aimais ça… j’aimais même profondément ça…
Le jeu auquel nous nous livrions était tellement risqué…
Et c’était ce qui lui donnait cette saveur si exquise…
Nous n’aurions jamais du faire tout ça…
Nous n’aurions même jamais du échanger le moindre mot…
Mais désormais… il était déjà bien trop tard…

Je posais alors lentement ma main droite sur la taille de la demoiselle, avant de la faire lentement glisser sur sa hanche, ma paume s’arrêtant sur sa cuisse… une partie de son corps particulièrement délectable, et dont je ne me passais plus depuis le coup du bar…
Ma main droite prenait donc place sur cette cuisse, tandis que mon autre main venait prendre place sur son ventre, juste à la naissance de sa poitrine, autant pour le plaisir de frôler légèrement celle-ci, que pour ressentir directement les battements de son cœur…

Je la gratifiais alors d’un nouveau baiser, sur le cou cette fois-ci, qui ne laissa pas tellement de répit à son cœur…
Je caressais sa nuque quelques instants avec mon nez, avant de lécher celle-ci, d’un grand coup de langue, allant pratiquement de son épaule à son oreille…
Mon bas-ventre pour sa part était particulièrement bien logé, et l’idée de la mordre qui se faisait de plus en plus pressante ne pouvait provoquer en cette partie de mon corps que plus d’excitation encore…


« - Tu veux savoir ce que ça fait… ? Tu veux que je te morde Kailey… ? » Lui soufflais-je à l’oreille, lascif au possible, bien décidé à l’entendre accepter.


En attente de sa réponse, et comme pour la pousser à dire oui, je me remis à l’embrasser, commençant par son oreille, et redescendant lentement en direction de son cou…
Si elle allait y résister… ?
Je n’en savais rien…
Mais… j’avais bon espoir tout de même…
Peut-être allait-elle le vouloir… ?
Mais personne ne pouvait le prédire…

Bah oui… malgré mon rôle de tueuse de vampire, si je m’en étais pris à lui… je me rendais compte que je me serais sentis monstrueuse…
Si je l’avais fais, j’aurais probablement pu dire qu’il avait raison en prétendant que les chasseurs n’avaient pas plus de conscience qu’il n’en avait lui-même.
Comme ceux qui avaient tués son frère…
Il avait beau dire que j’étais inhumaine, je ne l’étais pas à ce point.
Pas au point d’éliminer la seule personne au monde qui pouvait se vanter de m’avoir sauvé la vie…

Mais revenons-en plutôt aux faits.
Comme je vous le disais au départ, je m’éloignais de lui.
Pas très malin étant donné que je lui laissais une possibilité de s’en prendre à moi.
J’étais très inconsciente sur ce coup là mais… je n’y réfléchissais pas.
Je marchais au hasard, me laissant guider par mes pas et à aucun moment l’idée que j’avais un prédateur dans mon dos ne me traversa l’esprit.
Je savais pourtant qu’il s’agissait là d’une règle primordiale mais je l’enfreignais sans même le réaliser.

Pour ne rien vous cacher, j’étais entièrement accaparée par mes pensées… des pensées assez répétitives qui étaient plus ou moins identiques depuis que je l’avais rencontré et qui portaient presque exclusivement sur les vampires… et notamment sur celui-là.
Néanmoins, il ne tarda pas à m’en arracher brusquement.


« - Donc tu n’as pas posé ce piège… » Commença-t-il pensivement.


Oui, comme je viens de te le dire.
Quel intérêt aurais-je pu en tirer en plus ?
En tout cas, je n’avais pas recours à ce genre de « bassesses ».
Il ne pouvait pas le deviner mais j’avais des méthodes bien plus drastiques et j’évitais de laisser une chance à ma cible de s’en tirer « seulement » avec un pieu dans le ventre.
En règle générale, ma proie n’en réchappait pas.

Excepté lui…
Le terme exception le désignait à merveille décidemment.
Déjà parce que je l’avais raté, parce que je n’avais pas réessayé de l’embrocher, parce que je discutais avec lui et j’en passe…

Pas que j’en sois fière.
En fait, mon échec cuisant était encore bien frais dans ma mémoire et me prodiguait une certaine honte.
J’admets que j’avais réellement fais n’importe quoi ce soir là… et je reconnaissais humblement mes nombreuses erreurs…
Il devait horriblement me sous-estimer à présent.
Enfin, ça me faciliterait la tâche si jamais il devait y avoir une nouvelle confrontation de ce genre entre nous.
Ce que j’aurais préféré éviter, croyez-moi.


« … ça vient sans doute de tes deux acolytes, pas vrai… ? » Poursuivit-il en soupirant.


J’eu du mal à retenir un hoquet de surprise…
Il… Il savait ?
Oh mon Dieu !
Comment ?!
Comment l’avait-il découvert ?!
J’avais pourtant veillé à ce que notre discussion ne nous trahisse pas !
Alors… il… il l’avait deviné ?

Je ne comprenais pas bien mais n’étais absolument pas rassurée.
Toute trace de sérénité me quitta définitivement… si tant est qu’il m’en restait encore un peu…
Je déglutis péniblement, m’immobilisant assez abruptement.
Raide et nerveuse, j’attendis donc la suite de son discours.

Maintenant qu’il savait, qu’allait-il faire ?
Evidemment, s’il s’en prenait à eux ou ne serait-ce que menaçait de le faire, je n’aurais d’autres choix que de le tuer… mais s’il le savait alors pourquoi ne s’était-il pas venger plus tôt ?
C’était assez incompréhensible.
Enfin, je n’allais pas m’en plaindre, non plus, loin de là !

Je commençais en tout cas à avoir très peur pour eux.
J’avais peut-être commis une erreur monumentale en leur taisant la vérité, en prétendant que leur cible était morte…
S’il leur arrivait quelque chose à présent, je… je ne me le pardonnerais jamais.
Et surtout, je ne le lui pardonnerais jamais.
J’avais d’ailleurs été claire à ce sujet, s’il s’en prenait à mes proches je ne lui laisserais aucun répit.
Bien sûr, je n’avais prononcé que le prénom d’Ashley mais il devait être suffisamment malin pour comprendre qu’il en irait de même pour Chris, pour Matt, pour Gunner et pour n’importe laquelle de mes connaissances.

Néanmoins, je devais admettre qu’il était toujours aussi perspicace.
Mes deux acolytes, hein ? …
D’accord, ils étaient mes partenaires lors de certaines chasses mais j’étais loin de contrôler tout ce qu’ils faisaient ou d’avoir mon mot à dire sur tous les plans qu’ils élaboraient.
J’aurais du mais ça n’étais pas le cas.
Il m’arrivait de penser qu’il avait besoin d’un chef, pour tout vous dire.
Bien entendu, ce chef ça aurait été moi… mais Matt ne l’aurait jamais permis…
Dommage, ça aurait peut-être évité ce genre de problèmes…
Pas de pièges, pas de plan bancal au « Vamp Hyre »… pas de Luca… et pas de doutes.
La belle vie, en somme !


« - Mais ça ne me regarde pas… » Reprit-il brutalement me prenant au dépourvue une énième fois.


…
… …
… … …
Heu… je m’en voudrais de te contredire mais… si.
Un peu quand même…
Non ?

Selon moi, ça le regardait plus que n’importe qui étant donné qu’il avait faillit mourir par deux fois à cause de notre « charmant » trio.
Je dis charmant parce qu’il était plus de charme que de choc vu nos ratés de ces derniers temps…
Mais ce que je voulais dire c’est qu’il était particulièrement concerné pour le coup…
Alors il y avait des tas de choses qui ne le concernaient pas, en commençant par ma relation avec Chris, mais ça justement ça le touchait directement.
Un détail qui, de toute évidence, lui échappait.

Pour ma part, je n’allais pas m’en plaindre.
S’il ne voulait pas parler de mon frère et de son ami, c’était tant mieux !
Et s’il ne comptait pas s’en prendre à eux, c’était encore plus « tant mieux » !
Apparemment, il n’attendait pas de réponses ou de confirmations… probablement suffisamment sûr de lui pour s’en passer.
On aurait dit qu’il… qu’il allait simplement en rester là…
Je l’espérais hein… mais… je trouvais ça assez surprenant, pour être honnête.

Je n’avais aucune raison d’insister ou de répliquer.
S’il connaissait l’identité de ses agresseurs depuis le début et n’avait rien tenté jusqu’ici alors il n’avait sans doute pas de raisons de les attaquer maintenant.
Et s’il venait de le deviner… il ne donnait pas l’impression d’être particulièrement en rogne.
Il n’avait même pas employé un ton de reproches, rien du tout alors… peut-être allait-il simplement laisser couler…
C’était peut-être trop beau pour être vrai mais je ne pouvais pas le condamner pour quelque chose qu’il n’avait pas encore fais et n’avait même pas parut songer.


« … par contre le romantisme, je ne sais pas… quand j’étais humain, j’ai passé ma vie à la ferme… » Fit-il changeant brusquement de sujet.


…
… …
… … …
Un… fermier ?
Sérieusement, j’avais du mal à y croire !
Il n’avait absolument pas l’allure du fermier… ni la tête.
Il ressemblait plutôt à un de ces citadins particulièrement charmeurs qui accumulaient les conquêtes…
Le genre d’homme qu’on aurait bien imaginé en train de flamber tous son argent au poker ou pour une femme de joie…

Comme quoi les apparences étaient trompeuses !
Il était là, sobre, classe et ténébreux… si impeccable…
Difficile de se dire que cent ans plus tôt il travaillait peut-être dans la paille et se lever chaque matin pour nourrir les cochons…

Du coup, j’avoue qu’il me surprenait une fois de plus.
J’aurais presque trouvé ça mignon…
Le vampire de mes cauchemars, celui qui me menait la vie dure depuis trois jours étaient un ancien fermier… ?
Sincèrement ?
Ça dédramatisait presque la situation d’un coup…

Bien sûr, il y a plus d’un siècle, la majorité des gens étaient fermiers.
Donc ses parents ne devaient pas faire exception…
C’était nécessaire pour vivre mais… aujourd’hui on voyait plutôt les fermiers comme les vieux rustres du coin…
Les préjugés que voulez-vous…

D’ailleurs… ses parents ?
Il m’avait vaguement parlé d’un frère vampire mais est-ce que ses parents avaient été transformés eux-aussi ?
Une famille de vampire… ?
Un concept très étrange… et plutôt déplaisante, en réalité.

« Quand j’étais humain »… Est-ce que ça lui faisait quelque chose de ne plus l’être ?
Est-ce que son ancienne vie lui manquait parfois ?
Est-ce que les vampires étaient capables d’éprouver du regret ou de la nostalgie comme nous ?
Je l’ignorais… probablement pas mais… entendre ça m’avait mis… mal à l’aise.
Je crois qu’au fond j’avais… oui, j’avais de la peine pour le lui humain.
Je veux dire maintenant il était vampire alors… le fermier était mort mais… je-ne-sais-pas… je trouvais ça troublant.

Sans mentir, j’aurais préféré qu’il ne me dise pas ça.
De nouveau, ça… ça l’humanisait trop.
Je ne voulais pas le connaître !
Je ne voulais pas connaître son présent et encore moins son passé humain !
Sinon… sinon… comment est-ce que j’allais encore pouvoir faire la distinction entre les deux ?!
Je refusais de le connaître parce que je refusais de porter sur lui un autre regard, je refusais qu’il puisse changer et devenir à mes yeux autre chose que ce qu’il était actuellement…


« - … alors à part les poules, il n’y avait pas grand-chose à charmer… »


…
… …
… … …

Malgré toute ma résistance je ne pus empêcher un sourire de se dessiner sur mes lèvres.
Grâce au ciel, il était toujours dans mon dos donc il ne pouvait pas le voir…
J’eu beau me morigéner et tenter de le faire disparaître il persista plusieurs secondes sur mes traits.

C’était… c’était drôle, je le reconnais.
La preuve que même un vampire pouvait faire preuve d’humour…
En revanche, mieux valait ne pas s’imaginer la scène sinon ce n’est pas un simple sourire qui allait m’échapper mais carrément un éclat de rire.
Eclat de rire que j’avais bien du mal à retenir…
D’autant que j’avais l’esprit assez fertile à ce niveau là…

Mais je ne pouvais pas me permettre de rire !
Déjà parce que je ne tenais pas à lui montrer qu’il était capable de me dérider moi qui m’attelai à rester renfrognée au maximum en sa compagnie.
Je ne voulais pas qu’il se sente victorieux, non plus !
Nous étions ennemis et toutes les blagues n’y changeraient rien !
Ensuite… je n’avais pas l’intention de le vexer.
Il risquait de croire que je me moquais de son ancien statut de fermier.
Ce qui n’aurait pas été tout à fait faux mais… c’était de la gentille moquerie.
Je trouvais ça amusant et curieux, voilà tout !

Les poules, hein ?
Ça pouvait être un bon entraînement…
En plus, vu ses talents oratoires et ses… attraits physiques, il aurait bien été capable d’en séduire une.
Après tout, il avait du en séduire des oies… si vous voyez ce que je veux dire.
Ça restait dans le domaine de la volaille, non ?
Et plus globalement dans le domaine de la ferme…

Non plus sérieusement, j’aurais été curieuse de savoir ce à quoi ressemblait la vie à cette époque.
Même la vie à la ferme…
Tout devait être très différent…
Rien à voir avec aujourd’hui…
Mais bien entendu, il était hors de question de l’interroger.
Je ne comptais pas « profiter » de son statut de vampire ou de son acharnement à me retrouver pour gagner un cours d’histoire gratuit !

Je méditais donc sur l’ex-humanité de mon « compagnon », ne faisait qu’à demi-attention au fait qu’il se rapprochait de moi.

« - Toi dis-moi par contre… » Continua-t-il alors repartant visiblement sur un autre sujet.


… Oui ?
Te dire quoi ?


« - … pourquoi… ? … »


Pourquoi ?
Pourquoi quoi ?
Je n’étais pas sûr de le suivre là…
Il voulait apparemment que je lui dise pourquoi mais… pouvait-il être encore moins précis ?!
Je n’en étais pas certaine…

Une moue incrédule se dessina sur mon visage, remplaçant mon amusement.
Pourquoi hein… ?
C’était une bonne question… vase mais éloquente.
J’en avais plein qui commençait comme ça pour ma part !

Pourquoi être revenu ?
Pourquoi t’acharner à me faire dire que tes caresses me plaisent ?
Pourquoi es-tu devenu vampire ?
Pourquoi m’as-tu sauvé la vie ?
Pourquoi je suis incapable de te tuer ?
Pourquoi je suis si déroutée en te présence ?

Vous voyez, je n’en manquais pas moi non plus…
De questions, je veux dire…
Mais lui, c’était autre chose qu’il avait en tête et il ne lui fallut pas longtemps pour me le dévoiler.


« - … parce que Chris est humain, ça signifie qu’il est meilleur que moi ?! » S’emporta-t-il légèrement.


…
… …
… … …

Heu…
Quelque chose comme ça, oui…
Ça et le fait qu’il n’avait jamais tué personne, ne m’avait jamais provoqué, ne m’avait jamais peloté sans mon accord… ni avec d’ailleurs… et s’était toujours montré très respectueux… très parfait… peut-être même un peu trop…
C’était atroce non ?
C’était sa propre perfection qui le desservait, le pauvre…

Mais il n’y avait pas de doute à avoir.
Sur la balance du bien et du mal, Chris remportait la victoire haut la main.
Alors oui… s’il voulait vraiment le savoir et bien oui.
Mon ami était meilleur que lui.
Mais pas uniquement parce qu’il était humain…
Enfin, peut-être qu’en tant qu’humain Luca avait été quelqu’un de très bien, un saint même… mais l’immoralité qu’avait engendré sa vampirisation changeait toute la donne.
Et s’il avait été humain et s’était comporté de la même manière mon opinion sur lui n’aurait certainement pas été meilleure.

Pourquoi prenait-il la mouche comme ça ?
Il aurait du le savoir, non ?
D’autant que les humains, à défauts d’être aussi forts, aussi rapides et aussi puissants que les vampires, étaient meilleurs.
Parce qu’ils avaient des principes, une morale et des sentiments.
J’étais donc au regret de lui dire que c’était justement le cas, que ça lui plaise ou non.

En même temps, je… je ne voulais pas le rendre jaloux.
Pour tout vous dire, j’aurais préféré qu’il se complètement fiche de moi… ainsi il n’aurait pas eu à l’être… et il ne serait jamais venu au Campfield Palace ce soir…
Ça ne m’amusait pas… cette situation…
C’était compliqué et incompréhensible !
Qu’est-ce que j’avais bien pu faire pour que ce vampire « s’intéresse » à moi au point d’être jaloux d’un être qui en temps normal aurait eu au plus l’intérêt porté à l’un de ses repas ?!
C’était insensé !

Quoi qu’il en soit, un lourd silence s’en suivit.
Je ne voulais pas répondre par l’affirmatif mais je n’allais pas mentir non plus.
Résultat, je me taisais, m’enfermant dans un mutisme probablement plus éloquent qu’un « oui » mais tant pis.

Bientôt, je l’entendis s’avancer encore.
Il devait se trouver approximativement à un mètre de moi si je m’en fiais à mes sens.
Cependant, je ne voulais pas le regarder…
Je ne me l’expliquais pas mais… après ce qu’il m’avait dis et tout ce qui s’était passé, je préférais ne pas avoir à croiser ses prunelles.
Je redoutais bien trop ce que je risquais d’y lire… j’avais trop peur d’y lire cette colère si humaine que j’avais entrevue lorsqu’il avait évoqué Toma…


« - Mais tu as raison… il est très humain… » M’accorda-t-il, bien plus calme soudain.


…
J’allais de surprise en surprise avec lui !
Au moins, il le reconnaissait… ce qui était une bonne chose.
En tout cas, je ne lui faisais pas si bien dire !
Il ne connaissait pas l’adolescent, certes, mais moi qui le côtoyais presque tous les jours je savais qu’il était plus humain que n’importe quel humain… hormis les religieux hein !
Il avait bien plus de qualités, de compassion, de patience et de générosité que moi par exemple…

Remarquez, ce n’était pas bien difficile…
Ashley aussi… Gunner aussi…
Je n’étais pas particulièrement un modèle de vertus, je vous l’accorde.
Mais je n’étais certainement pas un monstre, non plus.
J’avais des défauts certes mais j’étais bien humaine !

Mais bref, il l’admettait et je ne pouvais que m’en réjouir.
Oui parce que s’il avait continué son délire selon lequel le serveur n’était pas meilleur que lui, j’aurais été contrainte de le détromper et l’idée ne m’enchantait pas.


« - … et c’est pour ça qu’il ne pourra jamais te comprendre aussi bien que moi… » M’assena-t-il dans un souffle avec une incroyable assurance.


…
… …
… … …

Que ? … Quoi ?!
J’avais du mal comprendre !
Je… j’étais révoltée, outrée et… et choquée !
Qu’entendait-il par là ?!
Est-ce qu’il recommençait avec ces histoires abracadabrantes de « tu es inhumaine, blablablabla… » ?!

Rahh ! Je ne le supportais pas !
Il était tellement prétentieux !
Il s’imaginait vraiment pouvoir me comprendre ?!
Il se fourrait le doigt dans l’œil jusqu’au coude s’il pensait ce qu’il disait !
J’étais humaine et jamais, oh grand jamais, un vampire ne pourrais concevoir ne serait-ce que la plus infime partie de ce que je ressentais !
Déjà que les humains avaient du mal alors les mots-vivants…
Pff… Non, franchement, c’était comique là !

J’en aurais tremblé d’indignation !
C’était aberrant ce qu’il disait !
J’étais… j’étais une serveuse comme les autres et le fait d’endosser quelques fois le rôle de chasseuse ou d’avoir de bons reflexes ne faisait pas de moi un monstre !
Lui, il l’était mais pas moi !

Je ne partageais rien du tout avec lui et nous étions incapables de nous comprendre !
C’était dans notre nature !
Nous étions ennemis, nous étions les exacts opposés alors… alors ce qu’il disait n’avait pas de sens, n’est-ce pas ?!
… N’est-ce pas ? …

Chris… Chris aurait très bien pu me comprendre…
C’est juste que je ne lui en donnais pas l’occasion, à lui et à personne…
Mais Luca… Luca n’avait pas d’âme alors comment osait-il prétendre ce genre d’idioties ?!
Je… je n’étais pas comme lui !
Je ne le serais jamais !
Aussi ne pourrait-il jamais me comprendre !
Et vice-versa d’ailleurs…

Pourquoi… pourquoi cherchait-il à me tourmenter comme ça ?
Pourquoi… pourquoi est-ce que ce qu’il disait me faisait si peur ?
Je savais pertinemment que c’était faux pourtant…
Ça ne pouvait pas être vrai… alors… pourquoi est-ce que ça me rendait si fébrile, si furieuse ?
Je ne comprenais pas pourquoi je me sentais si mal tout à coup…
Tellement déroutée…

Trop pour le sentir venir en tout cas…
Plongée dans cette confusion sans limite, je ne réalisais pas immédiatement le danger imminent qui allait s’abattre sur moi.
Et le « piège » se referma sur moi sans que je ne m’en rende compte… un piège qui avait l’apparence d’un séduisant jeune homme d’une vingtaine d’année mais qui était plus dangereux et mortel que n’importe quel poison…

En effet, avant que je ne puisse me défendre, le suceur de sang se colla langoureusement à moi dans une position que je n’étais pas sans connaître…
Une position similaire à celle dans laquelle il nous avait lui-même placé trois soirs plus tôt.
Dos à lui, mes muscles se crispèrent instantanément sous ce contact inattendu et angoissant…

Toute la tension en rapport avec sa phrase précédente se volatilisa brusquement laissant place à… à une tension très différente… plus « physique »…
En réalité, son discours me sorti brutalement de l’esprit.
Il n’y avait plus que lui… lui et le danger qu’il représentait… lui et son affolante proximité…

Je luttais tant bien que mal pour ne pas le laisser m’affecter toutefois lorsque ses lèvres se déposèrent sensuellement sur mon épaule, je su que le combat était perdu d’avance.
Toute volonté semblait m’avoir quitté et mon cerveau semblait totalement englué… comme hypnotisé par l’interdit de ce moment.
Néanmoins, je résistais péniblement tentant de ne pas le laisser gagner sans même avoir combattu…

Il déposa alors un second baiser à la base de mon cou, ce qui m’arracha un frisson dont je ne savais définir la nature.
Ni bon, ni mauvais… quelque part entre les deux…
Mais je ne pouvais pas… pas baisser les armes si facilement !
Je devais au moins lui opposer un peu de résistance, lui faire comprendre mes réticences !
Pourtant, celles-ci semblaient s’être évaporée et m’avoir abandonnées sans crier garde.

Déjà mon souffle commençait à s’étrangler dans ma gorge et mon cœur à faire des siennes…
C’était tellement… tellement lamentable…
Je… je devais me reprendre !
Ne pas le laisser avoir le dessus comme la dernière fois !
Parce que… je me souvenais trop bien de l’effet qu’il avait eu sur moi et de la bêtise que j’avais faillis commettre… et que ça ne devait surtout pas se reproduire !
Surtout pas…

Alors pourquoi… pourquoi une part de moi se sentait si exaltée ?
Grr ! Je la détestais !
Et je le détestais aussi !


« - Et à force de m’offrir si généreusement ton cou à chacune de nos rencontres, je vais finir par prendre ça comme une invitation… » Me glissa-t-il d’une voix vibrante.

…
Je… je ne… je ne lui offrais rien du tout !
Je ne lui offrais pas généreusement mon cou !
Qu’est-ce que j’étais censé faire ?
Me balader avec un tchador juste au cas où je tomberais sur lui ?!
Je… je ne l’invitais à rien !
Je ne voulais pas… je ne voulais certainement pas le provoquer ou lui donner envie de me mordre !
Je… je ne tenais pas à finir en repas pour vampire, moi !
Et Dieu sait à quel point j’avais peur de ça…

Je m’apprêtai donc à riposter… du moins à essayer vu à quel point j’avais le cerveau en compote lorsque sa main droite se posa doucement sur ma taille faisant disparaître toute volonté de répliquer.
Ce qui ne s’arrangea pas avec le mouvement qui suivit.
En effet, ces doigts audacieux se mirent à glisser lentement le long de ma hanche avant de s’immobiliser sur ma cuisse à un endroit que mon mini-short ne couvrait pas…
Quant à sa paume restante, elle ne me laissa pas le moindre répit, venant prendre place juste sur mon ventre, juste sous ma poitrine…

Je… je n’avais plus d’échappatoire… mais est-ce que j’en avais cherché un au moins ?
Je n’en étais plus si sûre…
Notre position aurait pu paraître anodine pour un « couple »… d’éventuels passants y auraient sans doute vu un « câlin » assez voluptueux…
Pour moi, c’était différent.
Nous n’étions pas un couple… nous étions deux « prédateurs » qui nous menions une guerre acharnée… mais de toute évidence il était plus fort que moi…
En même temps lorsque votre propre corps vous trahis que vous reste-t-il à faire d’autre que de vous rendre ?
Pas grand-chose…

Je n’avais pas envie de me rendre !
Ma raison se rebellait mais… mon opposition était futile, comme le confirma sa bouche lorsqu’elle entra en contact avec mon cou…
Dès lors, ma détermination et mon courage se dissipèrent comme pour enchantement.
Je ne pensais plus à rien…
J’’étais morte de peur mais il y avait autre chose de caché sous ma panique, quelque chose de sauvage et d’intense… que j’entrevoyais à peine mais qui m’empêchait d’hurler, qui au contraire m’intimait le silence.

Mon cœur battait la chamade et ma respiration se faisait de plus en plus saccadée ce que ma bouche entrouverte rendait parfaitement audible.
Mon sang bouillonnait dans mes veines et ma vision elle-même parut se voiler… à l’image de mes pensées peut-être qui étaient plus brouillées que jamais.
Je frémissais de… d’impatience ?
Pourtant, l’idée de ce qu’il pouvait me faire me dégoûtait et déchaînait en moi une terreur assez prononcée, presque des sueurs froides mais… une fois encore j’étais partagée.
Des émotions contradictoires et violentes faisaient rage en moi et j’étais incapable de les contrôler ou de me ressaisir…

Bientôt son nez glissa délicatement sur ma nuque m’offrant des frissons assez prononcées.
Il avait le pouvoir… et je n’étais pas certaine de vouloir le lui reprendre.
Il pouvait me faire du mal et… et il y avait fort à parier pour qu’il le fasse néanmoins je… j’étais tétanisée par la peur et sa diabolique antagoniste.
Je fermais alors les paupières autant pour tenter de reprendre mes esprits que pour… « savourer » un peu plus les sensations interdites qu’il me procurait.
Je devais me reprendre, c’était urgent et vital !
Si je ne le faisais pas immédiatement après il serait trop tard !

J’avais honte… tellement honte de moi et de ma… docilité…
Je savais que j’aurais du mettre un terme à tout ça dès qu’il s’était collé à moi et j’ignorais encore pourquoi je ne l’avais pas fais mais j’avais à présent le sentiment que c’était trop tard.
J’étais sous son emprise et je détestais ça… du moins en partie…
J’avais ce désir de me laisser aller, de laisser mon esprit s’engourdir à sa guise sans tenter de le maintenir à l’affut comme en cet instant…
Ne plus se battre… contre personne… et surtout plus contre moi…

Qu’est-ce qu’il m’arrivait ?
Pourquoi est-ce qui je ne parvenais pas à le repousser ?
La première fois, j’avais mis ça sur le compte de ma confusion suite à ma visite au « Vamp Hyre » mais là… qu’est-ce que je pouvais bien trouver pour justifier ça ?
Je… de la colère !
C’est ça ! Je devais absolument retrouver ma colère, récupérer cette rancœur que j’avais égaré au coin d’un baiser…
Je ne devais pas oublier ce qu’il était et ce que moi j’étais… ce qu’il avait fais et tout ce que nous nous étions dis…
Aussi attirant qu’il puisse être il n’en restait pas un être maléfique !
C’est… oui, voilà !
C’était exactement ça, il…

C’est alors que je sentis sa langue s’aventurer hors de ses lèvres et venir voyager de mon épaules à mon oreilles…
Je… qu’est-ce que j’étais en train de penser déjà ?
Je ne me souvenais plus…
Je…


« - Tu veux savoir ce que ça fait… ? Tu veux que je te morde Kailey… ? » Souffla-t-il lascivement à mon oreille.


Je… Je… je n’en savais rien…
Est-ce que je le voulais… ?
Je ne le croyais pas mais… peut-être que si, en fin de compte…

La dernière fois qu’il avait dis ça, qu’il m’avait demandé si je voulais savoir ce que ça faisait, il n’avait pas attendu de réponse aussi m’attendis-je presque à ressentir une douleur significative…
Mais non, rien…

Frustrée ? Soulagée ?
Les deux à la fois… enfin, je crois…
Tout était si embrouillée !
Je détestais ça !
J’étais sur le point de lâcher prise mais… je n’y parvenais pas.
Je ne pouvais pas complètement me résigner.

Comment est-ce que j’aurais pu avoir envie qu’il me mordre ?
Frôler la mort avait le don de provoquer des sensations en moi mais là… là non…
Ça aurait été… il aurait fallut être folle pour aspirer à ça… non ?
C’était quelque chose qui n’arrivait que dans mes pires cauchemars alors… pourquoi est-ce que je ne répondais pas… ?
La réponse était évidente pourtant et j’aurais du être capable de la lui donner vivement toutefois… il faut croire que ce n’était pas aussi simple que ça.
Comme tout ce qui touchait à ce vampire apparemment…

Est-ce que… est-ce qu’il le demandait à toutes ces « victimes » ?
J’en doutais…
Et je doutais surtout que toute aussi peu pressée que moi de répondre…
Est-ce que… tout ça… est-ce que ça avait une signification précise ?
Pour l’heure, ça m’échappait…
J’étais trop bouleversée pour pouvoir réfléchir et analyser les choses…

Ses lèvres pour leur part recommencèrent leur pérégrinations, déposant de petits baiser assez… déroutants… sur ma peau brûlante, commençant par l’oreille et atteignant progressivement mon cou…
Pour moi, ça ne s’arrangeait pas.
Est-ce que de là où était placé sa main il était capable de ressentir combien mon cœur était affolée… combien j’étais affolée… et troublée ?
Est-ce qu’il pouvait percevoir dans mon souffle haletant l’intensité de ma peur et de son obscure rivale qui m’obligeait à ne pas m’écarter de lui ?

Un gémissement presque inaudible mourut sur mes lèvres tandis que j’essayais désespérément de réagir et de m’arracher à son emprise.
C’était trop dangereux !
Je… je lui avais déjà demandé de ne plus me toucher non ?
Alors… alors pourquoi ne m’écoutait-il pas… ?
Tout aurait pu être si simple…
Mais il… chaque fois il devenait plus audacieux, se permettait plus de choses… à croire que je l’encourager !
Pourtant, je… je faisais mon possible pour faire précisément l’inverse mais… je ne devais pas être très convaincante, allez savoir pourquoi…

J’avais besoin de me raccrocher à quelque chose, à la réalité et vite !
D’autant qu’il attendait une réponse et que j’avais tout intérêt à réussir à dire non très vite !
Sans trop savoir ce que je faisais emportée très loin de la raison par ses lèvres impudentes, je posais ma main sur la sienne, l’agrippant fermement.
J’ignorais si c’était pour le retenir ou pour m’empêcher de sombrer mais quoi qu’il en soit, ce fut ce geste qui me fut salvateur.

A peine avais-je enserré ses doigts que, dans un imperceptible sursaut, je fus entraînée loin de la réalité…
Une nouvelle fois, je le vis, lui…
Je n’aurais pas su dire où il était mais il faisait très sombre, trop pour que je puisse distinguer quoi que ce soit.
Passé ou futur là encore difficile à dire… dans ces moments là c’était toujours le présent pour moi…

Avant que je ne puisse comprendre ce qu’il se passait ou ce qui allait se passer, je le vis s’attaquer à quelqu’un… un vieillard apparemment…
J’aurais voulu crier pour lui dire de faire attention mais dans ce monde-ci… je n’avais aucune prise et ma mise en garde ne l’atteindrait jamais…
Ici, j’étais condamnée à toujours voir, parfois même à ressentir mais à ne jamais intervenir…
C’est donc horrifier que je le vis planter ses crocs dans le cou du malheureux qui poussa un râle étranglé mais se débattit à peine…

Sur cette pathétique vision, je revins à moi.
Une douche froide… exactement ce dont j’avais besoin en somme.
Je pouvais remercier le ciel de m’avoir remis dans le droit chemin…
Ne pas s’attarder à sa bouche qui ressemblait à une petite flamme sur ma peau !
Juste retenir ce que je venais de voir et ne pas lâcher cette fois !
Je… je n’en avais pas réellement envie mais… je ne devais surtout pas retourner à cette torpeur dans laquelle il m’avait plongé.
Un revirement de situation brutale, je le reconnais… mais crucial pour le cou… heu je veux dire le coup.


« - N… Non ! » M’exclamais-je avec virulence, arrachant brusquement sa paume de ma jambe.


Je m’écartai de lui, faisant presque aussitôt volte-face… ce qui n’était pas une bonne idée au vue de notre proximité.
Je restais donc là, les lèvres entrouvertes, légèrement pantelante, le fixant d’un regard brûlant et habité par des émotions particulièrement contradictoires…
J’étais chamboulée et malgré ma volonté de ne pas le laisser transparaître je pouvais difficilement faire autrement vu l’ampleur de mon ressenti.


« - Je… » Commençais-je presque agressive avant de m’interrompre tout aussi rapidement que j’avais commencé.


Je ne savais pas exactement quoi dire.
J’étais là… et il était si près et je… je ne pouvais pas oublier ce que je venais de voir pourtant j’aurais donné cher pour pouvoir le faire.
Ses yeux, ses lèvres, je… pourquoi est-ce que le regarder me plongeait dans cet inexplicable émoi soudain ?!
Je le détestais pourtant !

Mais je… lui faire face… je ne sais pas mais ça me perturbait brusquement.
Pour la troisième fois au moins, je repoussai la vision de mon rêve et du baiser que nous y avions échangé…
Ce n’était pas le moment du tout pour de telles pensées !
Je m’humectai alors nerveusement les lèvres, tentant de me souvenir ce que j’allais lui dire.


« - Je… » Retentais-je, presque timidement, visiblement lointaine…


Consciente que je me perdais toute seule, je secouai légèrement la tête avant de faire volte face, de m’éloigner de quelques pas et de le replacer dans mon champ de vision.
Voilà qui était déjà mieux…
A présent, je pouvais retrouver un peu de mon calme…
Façon de parler évidemment puisque j’étais très loin d’être tranquille.
Mais la distance me permit de replacer sur mon visage une expression accusatrice et colérique.


« - C’est… C’est pour ça que Chris est et sera toujours meilleur que toi ! » Lui crachais-je alors furieusement, les prunelles encore très animées.


C’est pour ça ?
Bah… ça valait pour beaucoup de choses en fait.
Mais notamment pour ce que j’avais vu… ce qu’il ne pouvait sans doute pas imaginer, en somme.
Et puis… pour ce qu’il faisait… me toucher et tout ça…
Et aussi pour ce qu’il générait en moi…
De toute manière, il y avait tout un tas de raisons alors bon, je n’allais pas les lui énumérer non plus.


« - Je ne suis pas… ! … » Entamais-je avec hargne.


Je m’interrompis baissant imperceptiblement là tête.
Qu’est-ce que je n’étais pas ?
Une humaine qui a deux reprises maintenant avais faillis se laisser mordre par un vampire sans broncher ?
… …


« - Je ne suis pas comme ça… » Soufflais-je plus pour moi-même que pour lui.


Je redressais alors le visage, plantant mon regard droit dans le sien, tentant de ne pas ciller et de ralentir le rythme toujours effréné de mon cœur dont le bruit sourd et frénétique me vrillait les tympans.


« - Maintenant, laisse-moi tranquille ! » Lui intimais-je alors avec une assurance relative.


Je le fixais alors attendant qu’il s’exécute…
Voyant au bout de cinq secondes à peine qu’il n’avait pas esquissé le moindre geste, j’eu un geste impatient de la main ponctué d'un soupir agacé avec de me mettre en marche, passant à côté de lui.


« - Je rentre chez moi. » L’avertis-je, renfrognée, sans trop savoir pourquoi je le faisais.


J’en avais vraiment l’intention…
Si je voulais le fuir ? Evidemment, oui.
Mais allait-il me laisser faire ou non ?
Personne ne pouvait le prédire…

Je voulais la mordre…
Oh bien sûr, puisque j’étais un vampire !
Mais… je m’étais retenu de le faire jusqu’à présent, seulement là…
Là, j’en avais véritablement envie…
Envie de goûter…
De planter mes crocs dans sa chair, et de goûter au sang bouillant qui se cachait à en-dessous…

Oui, je dois vous paraître bestial, monstrueux…
Un vrai monstre sans scrupule et sans la moindre raison…
Mais… ça n’avait rien de méchant…
Mon envie de la mordre j’veux dire…
Je ne serais pas assez fou pour la tuer !
Je voulais seulement… seulement la goûter…

Je prenais plus ça comme un moment de plaisir…
C’était juste quelque chose d’enivrant…
Quelque chose de fort et de délectable… aussi malsain que ça puisse être…
Et…
Je voulais partager ça avec elle…
Je voulais qu’elle le ressente… que l’on échange ça vous voyez…

De plus, elle en avait envie…
Ou en tout cas, même si une partie d’elle s’y refusait, cette dernière restait inévitablement muette, se montrant bien docile devant la partie qui y aspirait…
Elle le voulait tout autant que moi…
Exactement comme elle l’avait voulu trois jours plus tôt…

Même si elle s’était montrée légèrement plus farouche ce jour là…
La preuve que sa « volonté » faiblissait…
Enfin, ce qu’elle croyait être sa volonté… mais qui n’était en fait qu’un soubresaut de son humanité…
Une humanité qui se déchaînait pour prouver qu’elle existait…

Et c’était là son problème…
Pour elle, c’était blanc ou noir…
Soit elle était humaine et les vampires la dégoûtaient…
Soit elle n’était pas humaine, et c’est pourquoi elle aspirait à ma morsure…

Elle n’imaginait pas qu’un compromis puisse exister entre les deux…
Elle ne voyait jamais les nuances de gris…
Kailey, elle, elle…
A ses yeux, l’idée d’être humaine et de me désirer moi et le danger que je représentais, c’était totalement inconcevable…

…
Mais elle voyait ce qu’elle voulait hein…
Simplement, si elle s’entêtait là-dedans, elle allait devoir reconnaître quelque chose qui ne lui ferait sans doute pas plaisir… le fait qu’elle ne soit pas humaine…
Alors, regarde les nuances de gris bordel !

Raah !
Elle en était exaspérante à la fin !
Chaque fois, elle me « rabaissait » parce que j’avais le malheur d’être un vampire…
Et c’était tout ce qu’elle avait contre moi ?!
C’était débile !
On ne condamne pas quelqu’un parce qu’il est différent de nous !

Je détestais sa manière de faire les choses, de… de me repousser pour des excuses aussi merdiques…
Mais elle le faisait à chaque fois…
Toujours, c’était la même rengaine…
T’es un vampire, éloigne-toi !
…

Vous savez, ça aurait été plus simple si au lieu de détester le vampire en moi, elle m’avait détesté moi.
Parce que…
Je trouvais ça injuste…
Et je ne pouvais pas détacher mon esprit de cette fille…
La demoiselle était… elle m’avait tenu éveillé pendant trois jours d’affilée, m’avait complètement chamboulé la tête…
Alors je n’étais pas décidé à la lâcher…
Je désirais trop sa présence pour pouvoir m’en passer aussi facilement.

Mais je…
Ce sentiment là…
Je ne savais pas mettre le doigt dessus, mais…
Ce n’était pas une chose à laquelle j’étais habitué…
Je… ne connaissais pas ça…
Mon esprit n’était tourné que vers elle… elle l’accaparait totalement…

Je ne parvenais à rien depuis trois jours…
Elle prenait… beaucoup… trop de place.
Et j’en avais conscience…
Mais je n’étais pas assez fort pour choisir une solution drastique…
Et je ne voulais pas non plus !
Moi je voulais profiter de la seule chose qui me semblait avoir de l’intérêt sur cette planète… en l’occurrence, Kailey…

Et c’est pourquoi j’étais encore là…
Contre toute raison, contre toute logique…
Dans un contrepied parfait au destin qui avait tenté de mettre tout un monde entre nous…
Le présent lui prouvait qu’il n’était pas tout-puissant, et que nous avions toujours notre mot à dire…

Donc pour l’heure, je m’apprêtais surtout à la mordre…
C’était tout ce qui m’intéressait…
Son joli cou légèrement palpitant…
Le cœur de la demoiselle battait la chamade, sa respiration était saccadée…
Elle ressentait l’excitation de ce moment, au moins autant que moi…
Aucun doute là-dessus…

Sa main vint alors enserrer la mienne, celle-là même que j’avais posée sur sa cuisse…
C’était encore plus délectable soudain…
Parce que j’avais plus encore le sentiment que nous le partagions…
Je n’étais pas le seul à le vouloir et… elle… s’y préparait… ?
C’était presque une incitation !


« - N… Non ! » Réagit-elle avec virulence en jetant ma main de sa cuisse, me glaçant d’effroi.


…
… …
… … …

N…
Non… ?
N… Non ?!
C…
C’était…
C’était assez frustrant comme réponse pour tout vous dire…

Elle continuait de lutter, refusant finalement de partager cela avec moi…
C’était… presque décevant…
J’avais pourtant cru qu’on pourrait le faire… partager cela…
Plus comme un acte de passion que de torture…
Mais visiblement, ça ne se ferait pas… ça ne se ferait jamais…

La jeune fille fit immédiatement volte-face pour se dégager de mon étreinte, se retrouvant face à moi, dans une proximité étouffante qui avait même raison de la mienne… de raison…
Elle était donc là, à quelques centimètres à peine, la bouche entrouverte, apparemment perdue, le regard… on ne peut plus animé…
Je…
Je me sentais monstrueux soudain…
C’était comme de faire pleurer une petite fille, vous voyez le genre… ?
J’étais… horrible, n’est-ce pas… ?


« - Je… » Commença-t-elle avant de s’interrompre immédiatement.


…
Elle…
Kailey paraissait extrêmement chamboulée…
Et je… je ne saisissais pas tout… mais ça me suffisait pour me sentir affreux…
La demoiselle hésitait, apparemment perdue et bouleversée…
Je…
Est-ce…
Est-ce que je pouvais vraiment faire quelque chose… ?

Elle s’humecta les lèvres, dans un mouvement que j’aurais, en temps normal, pu trouver ravageur, mais…
A cet instant, je ne ressentais… qu’une sorte de malaise…
Je ne me sentais pas bien…
Et…
Je songeais sérieusement que l’état actuel de la jeune fille n’y était pas étranger…
Elle…
Pourquoi est-ce que je me sentais comme ça… ?
Pourquoi me faisait-elle me sentir comme ça ?!


« - Je… » S’essaya-t-elle à nouveau, le regard lointain.


…
… …
… … …

Lointain… ?
Perdu aurait été plus exact…
Elle était clairement mal en point…
Beaucoup trop chamboulée pour réagir de façon ordonnée…

Elle décida finalement de s’éloigner, pour reprendre contenance certainement…
Au bout de quelques pas, elle s’immobilisa, avant de me faire face à nouveau…
…
Mais pourquoi je me sentais si misérable moi ?!
Pourquoi je… me sentais si vulnérable aussi… ?
Je… ça ne me ressemblait tellement pas…

L’expression de la demoiselle se fit alors plus colérique…
Visiblement, ça avait marché…
Elle avait fait le bon choix en s’éloignant…
Moi, par contre, je me sentais pareil…
Pas vraiment bien…


« - C’est… C’est pour ça que Chris est et sera toujours meilleur que toi ! » Me cracha-t-elle, furieuse.

…
… …
… … …

Je suppose…
Je suppose que oui…
Au moins, dans sa tête, c’était clair…
Et son regard habité par l’émotion… et en particulier par la rage, ne mentait pas…
Elle me haïssait, et ce depuis le premier jour…
Et même si ça ne devait pas m’atteindre… ça le faisait…

Ça m’atteignait… vraiment…
Ça me faisait mal… ça me faisait enrager…
Je… ne voulais pas qu’elle me déteste…
Mais…
Je n’étais pas en mesure de changer ça…
Qui étais-je pour le croire… ?
Luca Dumbrava… un vampire comme les autres…
Comme les autres, sauf qu’il avait eu le malheur de « s’attacher » à une humaine…

C’était… blessant…
Au plus profond de moi, je me sentais bafoué, autant que rageur…
Parce que ce que je lui faisais ressentir la troublait, elle se permettait de me cracher ça au visage ?!
Qu’elle aille se faire foutre !
Si sa petite vie de mensonge lui convenait, très bien, je n’allais pas revenir !
De toute manière, elle s’en ficherait éperdument… alors qu’est-ce que ça pourrait bien changer…


« - Je ne suis pas… ! … » Entama-t-elle avec hargne.


…
… …
… … …

Hmmf…
A peine avait-elle prononcé cette phrase qu’elle baissait légèrement la tête…
Ah oui… ?
Tu n’es pas… ?
…
C’est ça, continue de te mentir…
Moi, j’en avais assez de ce petit manège…
Mademoiselle « Les vampires me dégoutent »…
Si elle n’avait pas été chasseuse, et ce genre de conneries, j’étais certain qu’elle n’aurait jamais rechigné avec tant de bordel…


« - Je ne suis pas comme ça… » Souffla-t-elle à voix basse.


…
… …
Pitoyable…

Si Kailey…
Si, tu étais définitivement comme ça…
Sinon ton cœur n’aurait pas réagi comme ça…
Un cœur qui continuait de s’agiter, toujours battant comme un tambour.
Tout comme toi avant de laisser ta raison prendre le pas sur ta passion…
Alors tu étais comme ça, que ça te plaise ou non…

La jeune fille releva le visage vers moi, me fixant avec détermination…
Moi je…
Je n’avais ni le courage, ni l’envie de la défier du regard…
J’étais… fatigué…
Elle refusait de voir qui elle était, parfait…
Mais je n’allais pas la poursuivre pendant des siècles pour tenter de le lui faire comprendre…


« - Maintenant, laisse-moi tranquille ! » M’ordonna-t-elle…


…
… …
… … …

C’était le pompon ça…
Est-ce qu’elle avait été aussi conciliante elle… ?
Elle ne m’avait même pas posé la moindre question, ni laissé le moindre choix…
Elle s’était ruée sur moi pour me tuer, sans aucune considération pour moi…
Et elle venait maintenant me sommer de la laisser tranquille ?!
C’était… le monde à l’envers là…

L’impatience s’empara d’elle en ne me voyant pas déguerpir…
A quoi s’attendait-elle aussi ?!
Que je fuie ?
Comme elle savait si bien le faire, vous voulez dire ?!
Oh oui, c’était un genre qui la connaissait, elle l’employait plutôt régulièrement…

Elle soupira alors, avant de se mettre en marche, passant brutalement à côté de moi…
…
C’était frustrant…
C’était rageant !
Elle…
Elle m’énervait !
Ah, je la détestais !


« - Je rentre chez moi. » Me prévint-elle, renfrognée.


Evidemment…
Quoi d’autre… ?
Tu passais ton temps à fuir de toute manière…
Dès que les choses ne tournaient pas comme tu le voulais, tu te contentais de les fuir, refusant toujours d’accepter la vérité… la réalité en face…
C’était… tellement pitoyable…

La fuite était son remède à tous les problèmes…
Au moins, c’était vite fait…
Mais au lieu de les régler, ils s’accumulaient…
Et de fait, elle s’empêtrait dans des tas de problèmes et de complications…
Mais vous savez quoi… ?
Qu’elle fasse bien ce qu’elle voulait en fait…
Mais je ne comptais pas en rester là sans lui avoir dit ma manière de penser…
Et j’en avais à lui dire…

Je fis alors un pas dans sa direction, me stoppant immédiatement pour lâcher ma première phrase.


« - C’est ça, fuis, tu ne sais faire que ça ! Dès que les choses échappent à ton contrôle, tu prends la fuite ! » Lui crachais-je, remonté.


Je la doublais alors, allant me planter droit devant elle, les pupilles habitées par une rage mélangée à une déception certaine…


« - Qu’est-ce qui t’effraie tant dans le fait d’être « comme ça »… ?! » La questionnais-je, le regard animé.


Mais…
Et pourquoi je lui demandais ça de toute façon ?!
Je m’en fichais…
Enfin, non…
Je ne m’en foutais pas…

Mais… j’en avais assez !
Encore une fois, elle n’aurait pas de réponse, ou un truc bancal qui ne vaudrait rien…
Mais même un truc totalement nul, elle s’y raccrocherait comme à sa bouée de sauvetage…
Et j’en avais sérieusement marre de lutter…
Ras-le-bol…


« - Non… de toute façon, tu n’as pas de réponse valable à me donner… » Soupirais-je, un rire nerveux m’échappant.


…
C’était désespérant d’en venir à dire ça…
Mais je le pensais…
Elle ne saurait pas s’expliquer…
Mais s’en tiendrait à sa « bonne conduite »…
Du vrai n’importe quoi…

Je me déplaçais alors assez rapidement dans son dos, la soulevant dans mes bras comme je l’avais fait trois jours plus tôt…
Même si cette fois-ci, un petit gémissement m’échappa, ma blessure me faisant toujours souffrir…

J’utilisais alors toute la super-vitesse que je pouvais, l’amenant directement devant sa maison…
…
Je n’étais pas un goujat pour autant !
Je n’allais pas l’abandonner en pleine forêt !
Alors, oui, je la ramenais devant chez elle…

Lentement, je la déposais sur le sol, un mini gémissement sortant de nouveau de ma bouche…
Ce n’était pas facile… et j’étais faible…
Je restais légèrement courbé en avant quelques secondes avant de me redresser.
J’offris à Kailey un minuscule sourire… dans une moue presque résignée.


« - Je… j’ai bien compris que tu ne voyais que le vampire en moi… » Lâchais-je, retrouvant mon calme, un sourire un peu plus grand, et légèrement… triste, se formant sur mes lèvres.


Je baissais alors imperceptiblement la tête, avant de m’éloigner de quelques pas…
Mais…
Je…
Je ne pouvais pas partir comme ça…
Non, j’avais… encore quelque chose à lui dire…
Je fis alors volte-face, la fixant avec sincérité.


« - Viens me voir le jour où tu changeras d’avis… non, ça m’étonnerait de toi… » Commençais-je, accusant moi-même le coup en baissant un peu plus la tête. « … viens me trouver quand tu seras prête à me tuer… » Conclus-je, ce sourire triste décidément tenace.


Je restais à l’observer quelques secondes, avant de finalement reprendre mes esprits…
Je me retournais, tentant d’utiliser ma super-vitesse pour rentrer, mais… celle-ci était HS…
J’allais devoir y aller par les moyens classiques…
Je m’éloignais donc de la maison de Kailey, boitant à moitié pour rentrer au manoir, cette blessure étant affreusement tenace…

Alors que ce soit lui ou moi, l’un de nous devais prendre cette décision.
De partir, je veux dire…
Et comme il ne semblait pas décider à le faire alors ce serait moi et je… j’allais le faire sans le moindre regret !
Et s’il revenait et bien je… je reproduirais exactement le même schéma et le repousserais autant de fois qu’il le faudrait !

J’étais déterminée !
… Ou disons que je comptais l’être…
Là je… je me disais ça mais ma volonté était vacillante…
J’avais toutes les peines du monde à réfléchir convenablement…
Il n’était pas tant question de rompre les ponts, je le reconnais.
Il s’agissait plutôt de le fuir… et de me fuir moi-même… ou cette partie de moi, si vous préférez.

J’en avais conscience, hein…
Que c’était lâche… au moins autant que me décision de ne pas le tuer…
Pour tout ce qui le concernait, j’étais… j’étais vraiment lâche…
Cependant, je m’en fichais.
Pour l’heure, ça n’avait aucune espèce d’importance !
Ce qui en avait par contre c’était de me sauver très vite et d’essayer de tourner la page, de ne plus ressentir toutes ces choses…

Je me dirigeais donc en direction de la maison, plongée dans un profond désarroi et envahie par une angoisse persistante.
J’étais passée à côté de lui, fière et droite… autant que faire ce peut bien sûr… mais je ne voulais pas lui montrer à quel point tout ceci m’avait retourné.
Mon cœur me trahissait suffisamment comme ça !
Il était inutile d’en rajouter…
Surtout après le regard dont je l’avais gratifié avant… avant de me reprendre…

Mais là, il fit un pas dans ma direction et je… c’était étrange mais j’en fus presque… soulagée.
C’était comme si… je ne voulais pas partir ainsi, pas comme ça…
Et pourtant j’avais véritablement eu l’intention de le faire mais… avant qu’il ne réagisse l’idée ne m’avait pas dérangé plus que ça…
Complexe, moi ?
Qui a osé dire une chose pareille ?
Bon d’accord, là-dessus j’étais la première à le reconnaître !


« - C’est ça, fuis, tu ne sais faire que ça ! Dès que les choses échappent à ton contrôle, tu prends la fuite ! » Cracha-t-il, apparemment remonté.


…
… …
… … …

Je le savais…
Je le savais bien !
J’avais parfaitement conscience de le fuir et d’être incapable de voir quoi que ce soit d’autre !!
Je… je m’en rendais compte…

Et… c’était sa faute aussi !
Si les choses échappaient à mon contrôle c’était sa faute…
Il… il pouvait comprendre que ça me faisait peur non ?!
Après tout, ce n’était pas lui qui avait prétendu me comprendre mieux que personne ?!
Alors, il aurait du… je-ne-sais pas au juste mais… pas le reprocher comme ça !
Non mais c’est vrai !
Ce… ce n’était pas la peine de me le dire sur ce ton là !

Je n’y pouvais rien, c’était plus fort que moi !
Et j’avais une trouille bleue quand j’étais avec lui !
Qu’est-ce que j’étais censé faire au juste ?!
Le laisser avoir le contrôle ?!
Ah pas de doute que ça lui aurait plu mais à moi ?
Il y pensait à moi ?!

… …
Oh et puis qu’est-ce que je racontais au juste ?!
C’était un vampire, évidemment qu’il ne pensait qu’à lui !
Il n’avait aucune considération pour moi !
Non, lui tout ce qu’il voulait c’était… c’était me mordre et me faire souffrir !
Parce que c’était tout ce que recherchaient les créatures comme lui !
A répandre la douleur et le chaos !

En outre, ce qui l’énervait ce n’étais pas tant que je fuis c’était que je lui résiste, j’en aurais mis ma main à couper !
Je… j’en avais vraiment assez…
Il n’était pas humain, il n’était pas comme moi alors… c’était logique qu’on ne s’entende pas.
D’ailleurs, je m’en fichais pas mal !
Au contraire, tant mieux !
S’il était fâché contre moi et m’en voulait, je n’allais certainement pas m’en plaindre !
… …
Raah ! Qu’il aille au diable !

Pourquoi… est-ce que je me sentais plus mal encore maintenant ?
Pourquoi est-ce que sa colère ne me laissait pas de marbre ?!
C’était ce que je voulais, non ?!
S’il me détestait alors il ne reviendrait plus… du moins plus dans ce rôle là… alors c’était… c’était vraiment une bonne chose… pas vrai ?

J’en étais là dans ma réflexion lorsqu’il me dépassa, venant se planter droit devant moi…
Pour ma part, je déglutis avec difficulté, peinant à soutenir son regard…
Il était si… expressif…
Comment… comment était-ce possible pour un vampire, à la fin ?!
Est-ce qu’il… feignait tout ça ? Est-ce qu’il jouait la comédie ?
Si c’était le cas, je le félicitais pour sa prestation…

Ses prunelles reflétaient de la rage et… de la déception ?
… …
Ah non !
Tout sauf ça !
Comme si c’était simple pour moi, comme si ça m’amusait !
C’était… c’était rageant !
Parce que… parce que quelque chose en moi faisait échos à sa déception et que je refusais de l’admettre.


« - Qu’est-ce qui t’effraie tant dans le fait d’être « comme ça »… ?! » Lança-t-il alors me glaçant le sang.


Je… tellement de choses…
La liste était longue et je… je n’aurais pas su par où commencer.
J’aurais bien aimé pouvoir dire que je n’étais pas effrayée mais… ni moi ni lui n’aurions cru à un tel mensonge.

Mais… c’était une bonne question.
Qu’est-ce qui me terrifiait tant ?
D’être « inhumaine » pour commencer… d’être mauvaise… de ne pas valoir mieux que ceux que je traquais…
D’être folle et monstrueuse…

Je…
Quand bien même je lui disais ça, il n’aurait pas compris et il ne le comprendrait jamais lui qui était mort depuis plus de cent ans.
Comment pouvait-il concevoir que je tienne à rester humaine et… du bon côté, dirons-nous… ?
Pour lui tout ça ne rimait à rien, n’avait pas de sens… et je ne pouvais pas l’en blâmer.
Après tout, il était un disciple de Satan alors le bien devait être pour lui un lointain concept auquel il n’accordait aucune valeur…

Et au delà de ça, j’avais… j’avais tout un tas de raisons !
De plus, ça ne le concernait pas.
C’était mes affaires, mes raisons et je n’avais pas à les partager avec lui !
Je n’en avais pas particulièrement envie non plus…
Je pouvais deviner par avance qu’il démonterait placidement le moindre de mes arguments alors… cette discussion était inutile !
Et dangereuse…

J’entrouvris la bouche, prête à répondre que je n’avais pas à me justifier devant lui lorsqu’il me prit de court une fois encore.


« - Non… de toute façon, tu n’as pas de réponse valable à me donner… » Soupira-t-il presque… tristement.


…
… …
… … …

Et bien si c’était tout ce qu’il avait à dire, je ne voyais pas ce qu’il faisait encore là !
Je n’avais aucune réponse valable à lui donner ?!
Alors pourquoi me poser la question dans ce cas ?!
De toute façon, il répondait à ma place et n’attendait pas que je prenne la parole…
Tss !
Qu’il monologue tant qu’il le voulait, je m’en fichais royalement !

Ce qui était le plus énervant là-dedans c’est qu’il y croyait… et qu’à cause de ça je… je me demandais s’il avait raison.
Mes motifs et mes craintes… n’étaient pas valables ?
Si…
Si, bien sûr que si !

Quand je vous disais qu’il se moquait éperdument de mes sentiments !
Normal puisqu’il n’en avait pas lui-même !
Pourquoi je m’énervais moi ?!
Ça n’aurait jamais du me mettre dans un tel état.
De toute manière, je le détestais !
Il pouvait dire ou croire ce qu’il voulait ça ne me touchait pas !

J’allais donc me taire puisque il le prenait ainsi !
Déjà que je n’envisageais pas de partager avec lui le pourquoi de ma frayeur et bien là… encore moins, je vous pris de me croire.
De toute façon, il ne voulait pas vraiment le savoir puisqu’il n’avait même pas la décence d’attendre que je réponde avant de juger ma réponse.
C’était tellement…
Grrr ! Il était tellement… énervant !

Je restais donc là en silence, froissée et… attristée par la tournure des choses.
Je… pourquoi attristée ?
Je n’en savais fichtrement rien…
Mais ça me dérangeait… son irritation et… l’autre chose qui émanait de lui…
Et le petit rire nerveux dont il avait ponctué sa phrase ne pouvait qu’amplifier mon mal être…
J’avais la dérangeante impression de l’avoir… blessé…
Pourtant… il était… il ne pouvait pas être blessé par ça… alors qu’est-ce que ça signifiait ?
Je savais que j’avais fais le bon choix et dis les choses qu’il fallait pour le repousser… mais… j’en serais presque venue à culpabiliser.
Presque, j’ait dis.

Je réfléchissais à tout ça, enfermé dans un mutisme résigné lorsqu’il se déplaça rapidement, se retrouvant dans mon dos sans que je n’esquisse le moindre mouvement.
Pourtant la position n’était pas pour me plaire ou me rassurer… d’autant que le souvenir de ses baisers était encore assez prononcé en moi…
Mais là… il fit une chose à laquelle je ne m’attendais pas mais qui n’était pas sans me rappeler quelque chose.
En effet, il me souleva dans ses bras comme il l’avait fais trois jours auparavant… comme les mariés vous vous souvenez ?

Sauf qu’alors qu’il m’arrachait au sol, un petit gémissement retentit…
…
Quel idiot…
Pourquoi faisait-il ça alors que ça lui faisait mal ?!
Il… il était blessé alors… alors je pouvais très bien me passer de sa petite démonstration masculine !
Je… quoi ?!
Je ne voulais pas qu’il ait mal par ma faute, voilà tout…
C’était… déplaisant comme idée.

Et puis, j’étais parfaitement capable de marcher, moi.
Je ne m’étais pas pris un pieu dans le ventre !
En plus ma maison n’était pas loin…
Alors pourquoi faisait-il ça en sachant parfaitement qu’il en souffrirait ?!
Il… était vraiment illogique parfois… vraiment… étrange…

En parlant de ma maison…
Où est-ce qu’il comptait m’emmener au juste ?
Probablement pas chez moi puisqu’il ignorait où c’était… alors où ?
Bizarrement malgré sa colère et tout ça, je… je n’avais pas peur… du moins pas pour ça.
Je ne comprenais pas pourquoi il faisait ça mais je doutais que brusquement il m’entraîne dans un coin pour me faire la peau, voyez-vous.
Il aurait très bien pu le faire à notre emplacement actuel vu le peu de passage et la discrétion que l’endroit fournissait…

Quoi qu’il en soit, il se mit en route.
Comme précédemment, je ne me sentais pas vraiment bien… et savoir qu’il était blessé et que je devais empirer la douleur ne m’aidait pas à me sentir à l’aise non plus…
Ce qui m’aida encore moins en revanche fut l’utilisation de sa super vitesse, légèrement réduite par rapport à la fois dernière mais toujours aussi insoutenable pour moi.
Peut-être qu’on s’y faisait… mais évidemment, je n’avais pas l’intention de le découvrir par moi-même !

Le paysage défila assez rapidement donc je n’eu pas la possibilité de reconnaître grand-chose.
Cependant lorsqu’il s’immobilisa… nous étions devant chez moi… à ma grande stupeur.
Je n’eu néanmoins pas le temps de me demander comment il le savait puisqu’il me déposa lentement.
Je retrouvais donc le sol avec plaisir… un plaisir qui fut ruiné par le gémissement quais-inaudible qui en découla…

Je… j’avais de la compassion pour lui…
Il avait mal et je n’avais rien arrangé…
Sans compter qu’il devait sa blessure à mon imbécile de frère.
Vampire ou non… je n’étais pas certaine qu’il l’ait mérité…

Je l’observais donc, la mine crispée tandis qu’il restait courbé en avant, paraissant reprendre son souffle.
Mais je… je ne lui avais rien demandé moi !
Je ne lui avais pas demandé de me ramener ou de me porter comme il l’avait fais !
Et maintenant… maintenant il…
C’était ridicule d’avoir fais ça…

J’aurais pu m’en sortir toute seule !
Je connaissais Campfield et le chemin pour rentrer alors pourquoi m’avoir raccompagné ?!
Il devait bien se douter que je n’en avais pas besoin puisque je vivais là !
En outre, j’étais armée alors je n’aurais rien eu à craindre !

Il se redressa ensuite et… ce fut encore pire…
Il affichait ce sourire… minuscule mais bien présent… et cette moue presque résignée…
Je… je ne savais pas exactement quoi mais ça me faisait quelque chose…
Ça remuait quelque chose en moi… quelque chose de peu agréable…
J’aurais voulu faire ressurgir toute ma colère et ma frustration pour venir combattre ce quelque chose et le faire disparaître toutefois je n’y parvins pas tellement.


« - Je… j’ai bien compris que tu ne voyais que le vampire en moi… » Lâcha-t-il plus calme tandis que son sourire s’élargit quelque peu.


Un sourire qui n’exprimait aucune joie… plutôt une sorte de tristesse qui me fit me sentir plus mal encore.

Qu’avait-il dit ?
Il avait compris que je ne voyais que le vampire en lui ?
… …
Très bien…
C’était… c’était ce qu’il fallait.

Et… en plus, que voulait-il que je vois d’autre hein ?!
Ce n’était pas uniquement une part de lui, c’était ce qu’il était !
Est-ce qu’il voulait que je vois cet ancien garçon vivant à la ferme et s’essayant à charmer les poules ?!
Je… si c’était le cas, j’étais désolée mais c’était impossible.
Parce que ce garçon était mort depuis très longtemps déjà…

Alors s’il le comprenait, je ne pouvais que m’en féliciter, m’en réjouir même !
Pourtant… pourtant à cet instant précis face à ce regard pénétrant, je… je me serais presque sentit cruelle.
C’était affreux parce que je savais que j’avais raison et que j’avais bien fais mais il… il… je détestais ce sourire qu’il arborait !
C’était… c’était odieux de me faire ça !
D’essayer de me faire culpabiliser alors que j’étais dans le vrai…
Le pire c’est que ça n’était pas loin de fonctionner…
Allez, Luca, encore un effort et ça me fera vraiment mal au cœur…

Et là, il… il baissa légèrement la tête et… et s’éloigna…
Il allait vraiment partir comme ça ?
Je…
Et bien qu’il s’en aille !
Bon vent !
Qu’est-ce que vous vouliez que ça me fasse ?!
Ça me faisait une belle jambe, tiens…
Je haïssais ce type du plus profond de mon être alors… il s’en allait ?!
Tant mieux !
Je n’allais certainement pas m’en plaindre !

Cependant, il fit volte-face…
Et bien ?
Qu’est-ce que tu veux encore ?!
Je croyais que tu partais !
…
Qui a dis que j’avais mauvais caractère ?


« - Viens me voir le jour où tu changeras d’avis… » Reprit-il alors.


…
Venir le voir ?
Le… Le jour où je changerais d’avis ?
Je… je n’étais pas sûre de comprendre…
Quel avis ?
Sur le fait qu’il n’était « qu’un » vampire ?

…
Je sais bien qu’il était immortel et avait le temps d’attendre mais si j’étais lui je n’aurais pas vraiment compté là-dessus.
J’avais eu suffisamment de mal à l’évincer de ma vie alors maintenant que ça avait l’air de marcher, je n’allais certainement pas revenir vers lui !
Ça n’aurait eu aucun sens !

Je n’avais pas l’intention de revenir vers lui, à ça non !
En aucun cas !
Il était bien trop… nuisible…
J’aimais le danger, il est vrai… mais celui-ci était d’un genre trop particulier, trop poussé pour que je puisse vraiment en être grisée…

En outre, venir le voir ?
Je n’avais aucune idée de où le trouver !
Pas que j’en ai l’intention, hein… mais je n’avais pas son flair et ses capacités.
Je n’aurais pas su deviner où il habitait comme il l’avait fais avec moi…
Mais peut-être m’avait-il tout simplement suivit.
Ça restait une possibilité convaincante.
Néanmoins, personnellement, je n’avais aucune envie de le suivre donc voilà qui réglait la question.
Et ne pas savoir ne pouvait que réduire davantage la tentation… non pas que je puisse être tenté de le revoir bien entendu… mais ne pas pouvoir le faire mettait un point définitif à cette « relation » qui n’aurait jamais du voir le jour.


« - … non, ça m’étonnerait de toi… » Conclut-il lui-même avant que je ne puisse le faire, en baissant un peu plus la tête.


…
Bien vu…
A croire qu’il me connaissait tout de même un peu…
Et même si j’aurais adoré le détromper, je n’allais tout de même pas prendre le risque de m’aventurer là où je pensais pouvoir le trouver.
Je n’étais pas inconsciente non plus.

Donc il avait raison.
Je ne le ferais pas.
Je n’irais pas le trouver pas même en cas d’absolue nécessité.
Sa compagnie était le pire des dangers et je préférais affronter des hordes de l’enfer que d’aller le trouver…
J’exagère peut-être un peu, je vous l’accorde.
Mais c’est pour bien vous faire comprendre à quel point cette hypothèse était absurde.
Après avoir mis tant de cœur à le repousser si j’allais vers lui maintenant… tous mes efforts n’auraient servis à rien.

Mais… est-ce que je devais en déduire qu’il n’essayerai plus de me recontacter ?
Est-ce qu’il comptait disparaître et me laisser tranquille comme je le lui avais demandé ?
… Probablement…
Ça le laissait sous-entendre en tout cas.
C’était… c’était un soulagement…
Oui, voilà… un soulagement…

Il allait se volatiliser définitivement de mon existence et tout allait rentrer dans l’ordre !
Je ne pouvais que m’en réjouir !
Et je… je le faisais d’ailleurs !


« - … viens me trouver quand tu seras prête à me tuer… » Fit-il alors sans se départir de ce sourire si troublant…


Oui…
D’accord…
Non, en fait.
Je n’étais pas certaine d’être prête à le tuer dans les jours à venir et… je voulais juste l’oublier.
Alors même si j’y parvenais et que cette histoire me sortait de la tête, au même titre que les choses qu’ils m’inspiraient, je… je ne serais pas assez idiote pour risquer de tout faire capoter en le réapprochant.
Je voulais simplement mettre un terme à tout ça, pouvoir ne plus jamais y songer et si je revenais auprès de lui, même pour le tuer… qui pouvait dire que ces émotions et cette faiblesse ne ressurgirait pas sans crier garde ?

Interdite, je le fixais sans ciller, incapable de dire quoi que ce soit.
D’autant que je craignais que ma voix ne me trahisse… ne dévoile le mal aise qui s’était emparé de moi…
Nous restâmes ainsi immobiles quelques secondes puis soudain il me tourna le dos et se mit en route tant bien que mal…

Est-ce que… est-ce que c’était un adieu ?
Je ne savais pas quoi en penser… ni quoi éprouver…
De la joie, de la tristesse, de la rancœur, de la colère, de la culpabilité, de la déception, du soulagement ?
J’étais incapable d’en être certaine…
Rien de tout ça et… tout ça en même temps…

Sans trop en avoir conscience je fis un pas comme pour le rejoindre mais m’immobilisai nette.
Qu’est-ce que je faisais ?!
Je n’allais quand même pas le retenir… ?!
Je… je ne pouvais pas en avoir en envie… !
Je refermai donc mes lèvres entrouvertes en une phrase qui ne fut jamais prononcée.

Le regard trouble, je le suivis des yeux jusqu’à ce qu’il disparaisse.
L’obscurité se referma sur lui et même en m’efforçant de distinguer quelque chose je ne voyais rien…
Pourtant mon esprit le visualiser très clairement… trop sans doute.
Blessé, le sourire triste, la tête basse… l’air presque résigné…

Raah !
C’était énervant !
Je me fichais de lui ! Je me fichais de ce type !
Je le détestais plus que tout au monde !
Et si j’avais cette espèce de boule dans la gorge ça n’avait rien à voir avec lui, c’était juste la compilation de tout ce qui s’était passé !
Une soirée riche en émotion…
Une deuxième…
Une de plus… une de trop…

Je baissai la tête, essayant d’analyser mon ressenti lorsque mes iris tombèrent en arrêt sur le pieu…
Un pieu encore couvert de son sang qui avait séché sur la pointe…
Un sang que l’on retrouvait sur mon tee-shirt… au niveau de ma poitrine…

Un soupir terriblement las m’échappa tandis que ma main me massait brièvement le front.
S’attardait ici ne servirait à rien.
J’allais rentrer, prendre une bonne douche et essayer de dormir un peu…
Demain tout irait mieux…

Non sans un dernier regard à l’endroit où il avait disparu, je m’engouffrai dans la maison.
Je fus accueilli par ma grand-mère qui me reprocha d’avoir traîné en route et de l’avoir fait s’inquiéter…
Si elle savait…
Je m’excusais donc tranquillement et prétendis que la tache rouge sur mon tee-shirt était du ketchup.
Elle eut l’air sceptique mais ne fis aucun commentaire.
Tant mieux… pour toutes les deux…

Je n’avais aucune envie de m’étendre sur ce qui s’était passé ce soir…
Je voulais juste être seule…
Sans m’attarder plus que de raison, je me rendis dans ma chambre ou je cachais le pieu avant de filer sous la douche…
Lorsque je fus propre… quoi qu’une part de moi se sentait encore très sale, je retournai dans ma chambre, me plantant à la fenêtre…

Je fixai mon regard à l’endroit où nous nous étions tenus quelques minutes auparavant.
… Où était-il maintenant ?
Se soignait-il ?
Affichait-il toujours cette expression si déprimante ?
Rahh ! Stop !

J’avais beau tenter de ne pas y penser, j’étais incapable de détourner mon cerveau du vampire et de sa mine avant de partir…
C’était frustrant !
J’étais soulagée… honnêtement !
L’idée qu’il ait définitivement quitté m’a vie me rassurait vraiment… mais… quelque chose me dérangeait là-dedans.

Avec un soupir à fendre l’âme, je rejoignis le confort de mon lit, m’allongeant sur le dos, gardant les yeux grands ouverts.
Je n’avais pas sommeil…

Il me fallut plus d’une demi-heure pour enfin somnoler me berçant d’une seule et unique idée :
C’était finit.
Cette fois tout était bien finis.
Je n’avais plus de soucis à me faire…

Toutefois… j’avais le pressentiment que je me trompais et que j’étais loin d’être au bout de mes peines avec lui…
Que c’était trop beau pour être vrai…